Alors que le ministère du Tourisme laisse entrevoir une fin d’année moins catastrophique en termes d’arrivées de touristes étrangers, force est de constater que le secteur semble aujourd’hui condamné.

Au point mort depuis plus d’un an, le secteur touristique espère profiter d’une relance prédite depuis des mois et des mois. La semaine dernière, des charters remplis ont atterri à Djerba. Les touristes, notamment venus d’Europe de l’Est, ont redonné espoir au secteur. Mais le tourisme est confronté à un mal bien plus profond, et la pandémie actuelle n’est pas la seule responsable de la dégringolade économique du secteur. A TV5 Monde, Jamil Sayah, professeur de droit public, explique que les annonces du gouvernement concernant une relance du tourisme en Tunisie « sont des méthodes de communication de l’Ancien régime, à la Ben Ali ». Chaque année, les autorités tunisiennes proposent des séjours défiants toute concurrence, particulièrement en Russie et en République tchèque. Mais pour les hôteliers et les compagnies aériennes, ces séjours n’apportent rien, ou presque.

La Tunisie est arrivée au bout d’un système de tourisme de masse, qui ne fonctionne plus. Dans notre pays, les touristes préfèrent des destinations désormais mieux cotées. Les complexes hôteliers tunisiens sont, pour certains, à l’abandon. Et en oubliant de se tourner vers le tourisme vert, vers les chambres d’hôtes ou vers le camping, la Tunisie n’a jamais réussi à faire évoluer ses offres. Certes, quelques endroits continuent d’attirer quelques dizaines de touristes, à Djerba, mais aussi Hammamet. Le système bancaire et les primes allouées par l’Etat ont permis aux promoteurs hôteliers de faire fortune, sans avoir à attirer les touristes dans leurs établissements. Ceux-ci sont désormais vides, le service y est déplorable et les offres « all-inclusive » ne permettent pas aux artisans et commerçants de profiter d’une manne financière qui accompagne généralement le tourisme.

Les chiffres sont d’ailleurs effarants : un touriste dans n’importe quel pays du monde débourse en moyenne 600 dollars lors de son séjour. Pour la Tunisie, c’est 150 dollars seulement. Seuls les compagnies aériennes sont gagnantes. La Tunisie, elle, même si elle continuait d’attirer les touristes, ne ferait que reculer la lente mort d’un secteur autrefois rentable. Et les chiffres avancés aujourd’hui par les uns et les autres — 14 % du PIB pour la Fédération tunisienne de l’hôtellerie contre à peine 4 % selon l’Institut national de la statistique — montrent que le « story-telling » tunisien fonctionne plus que le secteur du tourisme. Contrairement à ce qui est expliqué depuis la semaine dernière, ce secteur ne pourra se relancer sans une véritable refonte. Un drame pour les près de 500 000 Tunisiens qui vivent du tourisme, directement ou non. Les attentats, la qualité des infrastructures ou encore le coronavirus ont fini par définitivement tuer le tourisme tunisien, qui doit penser à se réinventer.