Par : Kamel Zaiem

Ce jeudi, un nouveau record, un triste record, est venu nous donner froid dans le dos : le nombre de décès, victimes du Covid-19, a atteint 205 en une seule journée. C’est dire que les courbes risquent encore de monter davantage et les citoyens se doivent d’être prêts à « cohabiter » avec des chiffres encore plus effrayants.

Autres priorités

Pendant ce temps, on ne donne pas l’impression, du côté des trois présidences, de se soucier outre mesure de cette flambée de statistiques de plus en plus décourageantes.

Aussi bien à la Kasbah, au Bardo qu’à Carthage, les priorités sont orientés vers d’autres ambitions, défis et agendas façonnés pour la réalisation d’autres objectifs qui n’ont rien à voir avec la crise sanitaire ni ce combat quotidien contre la mort.

Chez nos gouvernants, ce sont les batailles politiques et les règlements de comptes qui priment, laissant tout un peuple affronter seul et dans une totale anarchie, un sort tragique face au redoutable virus.

Et au moment où les autres pays font travailler leurs neurones pour limiter au maximum les dégâts et mettre au point les meilleures stratégies pour offrir de l’espoir aux gens face à cette cruelle pandémie, le notre se voit imposer la règle de l’immunité collective, qui s’obtient sans trop se déployer, au prix de centaines de milliers de morts sacrifiés à cause du manque flagrant de stratégie de gestion d’une telle guerre et surtout du manque de prise de conscience de la part d’une classe politique plus agile en matière de traitrise et de lâcheté.

Les basses  manœuvres nocturnes

Eh oui, alors que les regards sont dirigés quotidiennement vers les services d’urgence, les divers lieux de soins et les centres de vaccination, nos politiciens pourris se lancent abjectement dans de sales manœuvres pour servir leurs intérêts étroits, se repositionner pour mieux tenir les rênes du pouvoir et surtout pour gagner du temps et se remplir les poches et les comptes bancaires avant qu’il ne soit trop tard.

Au Parlement,  une nouvelle amnistie vient d’être passée en quasi catimini, dans de mystérieuses conditions. Le chemin a été balisé par le gouvernement à travers son chef ainsi que le ministre de l’Economie et des Finances qui s’est amusé, en compagnie de quelques « érudits » de la coalition au pouvoir, à manipuler le texte de loi dit de « Relance économique et financière » proposé en 2016 par le président de la République Béji Caïd Essebsi et qui fut largement contesté par l’opposition et également par la rue.

Un projet maquillé

Le stratagème utilisé, a consisté cette fois-ci, à dissimuler cette amnistie de fraude fiscale et de blanchiment de capitaux, sous d’autres dispositions bien plus consensuelles et séduisantes telles que l’ouverture de comptes en devises ou bien encore d’un accès avec une large facilité à l’octroi d’un logement.

Ce projet de loi vient d’être « glissé » au cours d’une séance plénière nocturne en présence de moins de la moitié des députés, ce qui a fait réagir les bonnes consciences et les représentants de partis politiques bluffés et leurrés.

Pour Samia Abbou, la députée du « Courant démocratique », l’article relatif à l’acquisition de logements n’est qu’un mirage car les facilités demeureront fictives. Il s’agit d’un article introduit afin de camoufler « l’instauration de l’Etat prôneur de crimes organisés par la légitimité de la loi ». Elle est même allée plus loin en rappelant que ce projet de loi permet aux contrebandiers et aux trafiquants de drogue ou d’armes de bénéficier d’une amnistie par rapport à leurs activités, tout en octroyant à l’Etat, 10% du montant versé dans les comptes en devises ouverts à cet effet, sans oublier l’exclusion de l’article 92 de la loi organique n° 2015-26 du 7 août 2015, relative à la lutte contre le terrorisme et à la répression du blanchiment d’argent, expressément prévue par la loi.

A l’avantage des contrebandiers

Mongi Rahoui, autre député de l’opposition, rappelle que cette loi a été rejetée à maintes reprises. « Elle a été proposée par Béji Caïd Essebsi dans le cadre de la loi de réconciliation nationale. Puis, la commission des finances l’a également proposée à l’occasion de la loi de finances de 2016. Ensuite, la commission des finances de l’ARP l’a rejetée à deux reprises en 2017 et 2019 », a-t-il déclaré. « En 2019, l’ensemble des députés membres de la commission des finances se sont opposés à la loi de relance économique en raison des règlements des infractions de change qu’elle propose. « Cette loi sert les intérêts des contrebandiers et du marché parallèle de devises », a-t-il considéré. L’élu soutient même que ces derniers auraient fait pression pour faire passer la loi.

En ces temps de pandémie, voilà à quoi pensent nos députés censés être les premiers à se consacrer aux solutions qui permettent de s’opposer au Covid-19 et de consolider le droit des citoyens à la vie. Et le show de ces rocambolesques trouvailles politiques risque, malheureusement, de s’étaler sur toute la saison estivale…

K.Z.