Par: Salem Trabelsi
Une bagarre dans un huis clos comme dans un avion par exemple a une explication psychologique qui se tient ! L’avion est un espace quasi utérin qui nous permet de régresser, de triompher de notre surmoi. Mais ce qui s’est passé dans l’avion de Tunisair la semaine dernière dépasse toutes les lectures logiques de la psychologie. C ‘est vrai qu’un espace fermé est propice à la régression mais, cette fois, même les limites de la régression ont été transgressées …La vidéo qui a circulé sur tous les réseaux sociaux en témoigne … Cette vidéo n’a pas seulement fait le buzz mais elle a tendu aux Tunisiens un miroir de ce qu’ils sont devenus… Sidération totale ! Sommes –nous vraiment comme ça ? … Agressifs, violents, et à la limite tueurs et tueuses né(e)s .
Le film « Tueurs nés » de Oliver Stone est sorti en 1994. C’est l’histoire d’un jeune couple qui décide de se lancer dans une virée sanglante tuant les personnes qu’ils rencontrent sur leur passage pour le moindre malentendu. De la violence gratuite dictée par un ego hypertrophié ? Pire, le film inscrit la violence dans l’ADN de l’identité et de la culture américaine. Il décrit une société qui a une soif pathologique de la violence. Dans notre fameux avion Tunisair d’ailleurs, la phrase a été lâchée : « Je vais te tuer à Tunis !» Voilà ! Nous y sommes ! Pourquoi cette scène a-t-elle choqué tout un pays ? Pourquoi, alors que nous sommes habitués à assister à des bagarres dans les bus et les métros ? Parce qu’elle ne résulte pas d’une crise de nerfs classique. Dans cette scène d’avion il y a de nouveaux codes de bagarres qui sont apparus, des instincts de meurtre au-delà de la mauvaise réputation dont souffre une certaine nouvelle génération de femmes. Elle a choqué parce qu’elle jaillit d’un comportement viscéral, d’une violence qui vient du nouvel ADN du Tunisien encodée par dix ans de langage politique de caniveau, par une banalisation de l’agression qui devient épisodique et récurrente chez les élus du peuple à l’ARP ainsi que par les dérives morales d’un tissu social paupérisé. Le ver est dans le fruit ! Désormais cette violence extrême fait partie de notre culture.
Venons-en maintenant à la manière d’organiser le départ d’un avion de la part d’une équipe responsable d’une compagnie aérienne. La question qui se pose d’abord c’est comment les stewards ont laissé les choses dégénérer ainsi ? Pourquoi n’ont-ils pas réglé ce problème de bagage en amont ? Pourquoi ils n’ont pas eu un réflexe d’anticipation ? Ont –ils eu une formation en gestion de crise à bord d’un avion ? Pourtant ils connaissent bien le profil des marchands de valise voyageant en Turquie .De toute évidence le commandant de bord possède l’autorité absolue dans son avion, on croit savoir qu’il peut même marier des couples à bord… Rien ! Cette totale démission du responsable de l’avion ainsi que de ses équipes reflètent aussi cette crise d’autorité en Tunisie perpétuée par un Etat démissionnaire et qui laisse libre cours à tous les dépassements. Plus personne n’ose intervenir pour limiter les dégâts. Tous les problèmes se règlent désormais au niveau de l’individu. Une poussière d’individus, voilà ce que nous sommes redevenus.
S.T
