Le président de l’ARP (dont les compétences ont été suspendues par le président Kaïs Saïed le 25 juillet 2021), Rached Ghannouchi a publié vendredi 1er octobre 2021, jour selon lui du démarrage de la 3ème session de la législature 2019-24 un long communiqué dans lequel il a haussé le ton contre le président de la République qu’il a accusé d’avoir bloqué de fait la Constitution et procédé à un hold-up sur les attributions de l’assemblée. Il lui a reproché, aussi, d’avoir regroupé tous les pouvoirs entre ses mains, un acte qui fait peur selon lui, et qui est, ajoute-t-il, en contradiction avec les défis de la Révolution de la liberté et de la dignité et des valeurs de la démocratie.

Dans ce communiqué, publié au nom de la présidence du Parlement, une instance qui n’existe pas puisque seul le bureau de l’assemblée est reconnu dans les textes, il appelle le président de la République à revenir sur le décret du 22 septembre 2021, de lever le gel qui frappe l’ARP et d’engager un dialogue national sans exclusive en vue de trouver les voies de sortir de la grave crise qui menace la cohésion de l’Etat et l’unité du peuple.

La « présidence de l’ARP », ajoute le communiqué, exprime son plein soutien total aux députés qui font face, précise-t-elle à des procès inéquitables pour des accusations non fondées liées à leur travail ou à leurs publications sur les réseaux sociaux, dont certains comparaissent devant des tribunaux militaires, avec le harcèlement de leurs familles.

Appel à la résistance

Le communiqué appelle les députés à reprendre leur travail parlementaire et de contrôle dans le calme, le respect total des dispositions de la Constitution et de la loi. Il les invite aussi à la résistance et à la persévérance dans ce qu’il nomme « l’épopée de la restitution de la démocratie et de son symbole « un parlement tunisien», en rappel du combat des Tunisiens en faveur de cette institution dès 1938.

Le président de l’ARP annonce enfin que le bureau de l’assemblée est en réunion permanente.

D’un ton particulièrement véhément, le communiqué publié au nom de la présidence de l’ARP a été posté sur la page personnelle de Rached Ghannouchi ce qui un indice qu’il ne lui est pas possible d’accéder à la page officielle du Parlement. Selon certaines rumeurs, le président de l’ARP gelée a tenté de tenir une réunion en visio-conférence du bureau du Parlement mais les moyens techniques utilisés à cette fin ont été bloqués.

En déclarant que le bureau de l’ARP est en réunion permanente, Ghannouchi lance un défi à Kaïs Saïed car ne l’oublions pas l’activation de l’article 80 de la Constitution en vertu duquel ce dernier a déclaré l’état d’exception suppose que l’assemblée reste en réunion permanente.

On se demande quelle manière Rached Ghannouchi entend mettre en œuvre pour assurer « la restitution de l’institution parlementaire » par les députés qu’il invite à reprendre leurs activités représentatives et de contrôle (du gouvernement).

L’ARP étant fermée et ses issues totalement bloquées par des renforts sécuritaires et militaires, on voit mal la possibilité de reprise de ses activités. A moins que l’on assiste tous les jours à un harcèlement de la part de certains députés- comme l’a fait le député nahdhaoui Mohamed Goumani pour rejoindre leur lieu de travail. Mais très peu d’élus peuvent se mobiliser à cette fin.

Ce texte- où l’on remarque que le terme de « putsch » ou « coup d’état » n’est pas utilisé ne serait dès lors qu’un baroud d’honneur pour sauver la face.

RBR