Alors que les dirigeants annoncent l’arrivée imminente de PayPal en Tunisie depuis plusieurs années, la plateforme de paiement américaine vient de refroidir les ardeurs tunisiennes en indiquant que la Tunisie n’était pas sa priorité.

Le 1er février dernier, Sami Mekki, PDG de La Poste tunisienne, lançait un pavé dans la mare : « Nous avons discuté avec PayPal et Master Card, mais il existe encore quelques blocages relatifs au change. Toutefois, il est possible de voir ce service en Tunisie avant le mois de juin ». A un mois de l’échéance, le dossier semble finalement bloqué : on ne risque pas de voir le service de paiements en ligne de sitôt s’installer en Tunisie. Depuis 2016, les tentatives tunisiennes de signer un accord avec PayPal ont toutes échoué. En 2017, la plateforme américaine avait déjà refusé le dossier déposé par la Tunisie et avait adressé au ministère tunisien des Technologies de la communication et de l’Economie numérique une lettre de refus catégorique. Le ministre, Anouar Maarouf, avait pourtant été optimiste après l’envoi, en septembre 2016, d’une « Comfort Letter » de la Banque Centrale à la société PayPal.

Alors que PayPal vient d’obtenir une licence permettant à ses utilisateurs d’acheter des cryptomonnaies, le dossier tunisien semble ne pas avoir avancé d’un iota. Il faut dire que les restrictions imposées par la Banque centrale aux utilisateurs n’aide pas forcément la plateforme américaine à s’intéresser au sujet. En effet, la conversion de la monnaie locale en devises est limité à un montant restreint. Et les dirigeants du pays veulent que cette limitation soit toujours appliquée, même avec Paypal, pour éviter un épuisement rapide des devises à la disposition de la BCT. L’annonce de Marouane El Abassi, gouverneur de la BCT, ce vendredi, n’étonnera donc personne : la Tunisie n’est pas une priorité pour PayPal, a-t-il indiqué. Et ce ne sont pas les conditions restrictives de la BCT concernant les opérations financières qui débloqueront les négociations avec PayPal.

Où est le problème ?

En 2017, des dirigeants de PayPal et des cadres du ministère des Technologies de la communication et de l’Economie numérique (TCEN) s’étaient rencontrés. Objet des discussions : lever les derniers obstacles empêchant l’utilisation de la plateforme de paiement en ligne en Tunisie. La Banque centrale de Tunisie avait alors transmis une lettre au ministère des TCEN pour demander à PayPal un « traitement particulier », selon Jeune Afrique. La BCT exhortait la plateforme à permettre le rapatriement dans le pays des fonds collectés sur les comptes PayPal des Tunisiens résidents. Car c’est bien là l’un des enjeux du problème : un résident tunisien ne peut disposer d’un compte en devises hors de Tunisie. Et tant que la législation tunisienne n’aura pas changé, les discussions entre PayPal et l’Etat risquent de rester au point mort.

La Tunisie espérait cependant que ce traitement personnalisé serait possible. Paypal s’est en effet parfois adapté à des législations en Afrique : en 2014, par exemple, la plateforme américaine avait autorisé les citoyens du Nigeria, du Cameroun, de Côte d’Ivoire et du Zimbabwe, qui utilisent le franc CFA, à utiliser ses services. Mais PayPal avait alors restreint les activités des utilisateurs aux seuls les virements de fonds vers des marchands ayant été agréés par Paypal. Autrement dit, il n’était pas possible d’envoyer ou de recevoir des fonds de n’importe quel utilisateur de PayPal. La société américaine ne semble, depuis, pas vraiment prête à faire des concessions vis-à-vis de la Tunisie : PayPal a demandé fin 2016 que les restrictions de la BCT ne soient pas appliquées à ses services. De quoi favoriser l’ouverture de comptes offshore pour les Tunisiens. Tant que la BCT ne lâchera pas du lest à ce sujet, PayPal continuera d’ignorer les requêtes tunisiennes. On n’est pas près de voir PayPal en Tunisie !