TUNIS, Tunisie (AP) — Les tribunaux tunisiens ont ordonné à certaines des plus importantes organisations de défense des droits humains du pays de cesser leurs activités, ce qui renforce les inquiétudes quant à l’érosion des libertés et au rétrécissement de l’espace accordé aux groupes qui contestent le pouvoir en place.
Mnemty, une organisation non gouvernementale antiraciste, est devenue mardi la dernière organisation en date à recevoir une ordonnance de suspension d’un mois, a déclaré son porte-parole Zied Rouin.
Sa présidente, Saadia Mosbah, est détenue depuis mai 2024 avec plusieurs autres militants des droits des migrants, alors que la société civile, autrefois dynamique après le Printemps arabe, s’est progressivement érodée tout au long du mandat du président Kais Saied.
L’annonce de Mnemty est intervenue moins d’une semaine après que des suspensions similaires aient été prononcées à l’encontre d’autres groupes de premier plan.
Le Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux (FTDES) a reçu une notification similaire lundi, et l’Association tunisienne des femmes démocrates, une organisation féministe de premier plan, quelques jours plus tôt.
Romdhan Ben Amor, porte-parole du FTDES, a déclaré lundi à l’Associated Press qu’il considérait cette mesure comme une tentative de détourner l’attention des grands enjeux nationaux, en particulier les manifestations environnementales qui secouent la ville de Gabès. Selon lui, le fait de cibler des groupes de défense des droits humains comme le FTDES « vise à stigmatiser les défenseurs des droits individuels et sociaux et des libertés ».
Il estime que le groupe a été pris pour cible en raison de ses positions sur deux questions : la crise migratoire et les affaires très médiatisées de « complot contre la sûreté de l’État » engagées contre des personnalités politiques et des figures de l’opposition.
Ben Amor a affirmé que la FTDES avait toujours respecté les lois sur la transparence financière. La FTDES prévoit de faire appel de cette suspension, a-t-il ajouté.
Les ordonnances de suspension d’un mois prononcées à l’encontre de la FTDES et de l’ATFD sont les dernières d’une série de mesures qui, selon les détracteurs, visent à restreindre le travail et l’indépendance des organisations de la société civile depuis la consolidation de tous les pouvoirs par Saied en 2021.
En tant que président, Saied a souvent cité le financement étranger comme une menace pour la Tunisie, l’utilisant pour alimenter un discours populiste et accuser ses opposants politiques et les militants pour la justice sociale d’être des agents étrangers et de semer le trouble dans le pays.
La FTDES fait partie des dizaines d’organisations non gouvernementales qui ont été frappées par des audits financiers et fiscaux continus au cours des derniers mois. Les autorités les ont accusées à plusieurs reprises de servir des intérêts étrangers et de recevoir des fonds étrangers afin de pouvoir s’ingérer davantage dans les affaires intérieures du pays.







