Me Brahim BELGHITH
Il est tout à fait normal que pour un errant dans le désert, l’eau, l’ombre et la verdure deviennent une obsession. Du coup il est logique qu’il se fasse berner par le mirage mais qu’il réclame ce mirage le cas est au moins anormal voir pathétique quelque part.
Bientôt trois ans après le changement inconstitutionnel du pouvoir en Tunisie par Kais Said qui a vite imposé une nouvelle constitution qui consacre l’hégémonie de la présidence de la république et instaure d’autres pouvoirs ou fonctions selon ce texte, fragiles et satellitaires par rapport au président de la République qui fausse ou annule à la fois les jeux d’équilibre et de séparation des pouvoirs. L’avortement de l’expérience démocratique en Tunisie a été un vrai cauchemar que ce soit pour ses opposants que pour ceux qui se sont abstenus de le dénoncer au moins dans une première phase songeant à tort qu’ils pouvaient en tirer un profit politique.
Les crises à répétitions, les alertes aux complots, la répression, l’invisibilité sont les caractéristiques de ce règne sans partage apparent du pouvoir par un président de la République dans un déni de la réalité la plus évidente surtout celle de son échec même à diagnostiquer les interminables problèmes dont le pays souffre. Il préfère crier à la conspiration et discerner les condamnations de trahison à tour de bras, la justice et la police se chargeront d’exécuter ces sentences irréversibles.
C’est dans un chaos politique, économique, juridique et institutionnel que des voix s’élèvent pour réclamer des élections présidentielles sous forme de plusieurs initiatives appelant une partie ou la totalité de l’opposition au régime en place à subvenir à une entente sur un ou plusieurs candidats ou du moins se mettre d’accord sur une stratégie pour cet événement qu’ils jugent crucial pour l’avenir du pays moyennant des conditions sachant que certains ont déjà exprimé leur volonté ou leur décision de se porter candidat, malheureusement les programmes sont toujours une formalité pour la compagne électorale.
On s’adresse bien sûr dans cet article aux opposants du régime en place c’est-à-dire ceux qui ont qualifié le changement du 25 juillet 2021 comme un coup d’état ou un changement inconstitutionnel de pouvoir ceux qui ont soutenu ou ont considéré ce changement un acte qui s’inscrit dans la légalité ou la légitimité il est tout à fait normal qu’ils s’intéressent et participent aux élections présidentielles ou autres sous ce régime.
En effet pour l’opposition démocrate et tout citoyen légaliste qui a considéré le 25 juillet du premier coup un coup d’état il est évident qu’il s’agit d’un non-évènement électoral même si ça pourrait être un moment fort en communication politique. Tout d’abord participer c’est abdiquer c’est-à-dire légitimer le coup d’état du coup ses élections douteuses a bien d’égards ab initio et les participants priorisent le pouvoir à la démocratie surtout que selon la constitution de 2022 il s’agit d’élire un pharaon ou un khalif la Tunisie est loin d’être une république vu le contenu et l’application de ce texte. Pour défendre ce choix qui ramène de l’eau dans le moulin de Kais Said et « l’état profond » certains parle de pragmatisme et des conditions. Primo personne n’a sollicité leur participation pour qu’ils émettent des conditions, l’attitude plus logique et rationnelle c’est boycotter pour ensuite imposer des conditions s’ils sont appelés à participer. Secundo ils savent très bien que ces conditions ne seront même pas débattues ou reçues. Ajoutez à cela l’absence de garanties, loin des illusions du genre des élections truquées ne seraient pas acceptées de l’armée ou l’occident qui ne laisseront pas faire. Nous nous arrêtons sur le timing de ces attendues et prétendues élections et le contexte dans lequel elles se dérouleraient pour étayer l’usage des guillemets dans notre titre pour les élections présidentielles, ce ne seront pas de toute façon des élections au sens juridique et vrai du terme même
La question du temps pose les sujets du mandat présidentiel et du rendez-vous des prochaines dites élections qui semblait se tenir le 6 octobre 2024 selon un communiqué publié par la présidence [1]qui met fin au feuilleton de quand ? (1)La question plus adéquate sera comment ? pour le contexte on scrutera rapidement l’état des institutions pour prouver que les dés sont bien pipés (2)
1.La fin du feuilleton “quand ?”
Si le début du mandat du président Kais Said ne fait aucun doute à la suite des élections présidentielles anticipés dont le premier tour a eu lieu le 15 septembre 2019 et le 19 octocbre2019 pour le deuxième tour. Le président élu a prêté serrement devant l’assemblé des représentants du peuples le 23 octobre 2019 et a exercé le jour même après la passation des pouvoirs au palais de Carthage.
La fin du mandat présidentiel selon la constitution de 2014 serait le 22octobre 2024, seulement voilà le 25 juillet 2021 et sous prétexte d’appliquer l’article 80 de la constitution pour le cas de danger éminent, Kais Said a fini a imposé une feuille de route aux tunisiens dont l’adoption d’une nouvelle constitution par référendum. On ne s’attardera pas sur l’aspect illégale ou illégitime de l’œuvre de Kais Said déjà condamné par la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des peuples mais on va supposer que la constitution de 2022 est la constitution en vigueur ce qui est vrai de facto.
Tout comme l’article 75 de la constitution 2014 l’article 90 de la constitution de 2022 prévoit un mandat présidentiel de cinq ans s’agissant d’un statut juridique en cours , c’est dans les dispositions transitoires qu’il faut chercher la solution quant à la fin du mandat présidentiel puisqu’ aux termes de l’article 142 « La présente Constitution entre en vigueur à compter de la date à laquelle l’Instance supérieure indépendante pour les élections proclame le résultat définitif du référendum, et après que le Président de la République le promulgue et ordonne sa publication dans un numéro spécial du Journal officiel de la République tunisienne. Elle sera exécutée comme Constitution de la République tunisienne. »
Le problème les dispositions transitoires et finales ne contiennent aucune disposition quant à la fin du mandat du président, elles ne prévoient même pas que le président en exercice assure la fonction présidentielle jusqu’à la fin de son mandat au sens de la constitution 2014. Juridiquement parlant Kais Said n’est plus le président de la République à partir de l’entrée en vigueur de sa constitution faute de disposition contraire car deux constitutions ne peuvent cohabiter surtout pour celui qui a tout fait pour abolir la première.
Le président de la République de fait garde donc à lui de facto un autre élément du jeu c’est la fixation de la fin provisoire de son règne puisqu’il s’agit plus de mandat. Il va sans dire l’importance du timing et son choix et son incidence sur la compétition électorale.
Résultat des courses pour répondre à une question aussi technique et simple on devait procéder à des hypothèses voir des prédications sur ce que le président de la République pourrait bien décider. Va-t-il respecter la fin du mandat présidentiel au sens de la constitution de 2014 donc promulguer le décret pour inviter les électeurs aux élections présidentiels en application de l’article 101 de la loi électorale qui énonce : « Les électeurs sont convoqués par décret présidentiel dans un délai minimum de trois (3) mois avant le jour du scrutin pour les élections législatives et présidentielles et dans un délai minimum de deux(2) mois pour le référendum » donc s’il aura des élections présidentielles on le saura normalement 3 mois à l’avance même si de point de vue juridique cette formalité de convocation n’attribue pas au président la prérogative de fixer la date de l’élection qui est à la charge normalement , légalement et surtout légitimement de l’instance des élections dans le cadre de la décision de l’agenda électorale mais en Tunisie le seul décideur c’est le président de la république quid à altérer le principe d’égalité entre candidats car même dans un banal contrat la loi prohibe le fait qu’un contractant décide à lui seul une clause ou une condition d’une façon aléatoire selon son propre gré au détriment de l’autre contractant même consentant que dire des élections.
Pour résumer jusqu’au 02 juillet 2024 on etait toujours sur le point de départ la fin de ce mandat présidentiel était imprévisible.
Par moments les responsables de l’ISIE ont insinué que les élections seront organisées à la fin du mandat présidentiel ainsi dès le mois de février 2024 on a pu entendre leurs déclarations que les présidentiels se tiendrons en automne puis c’est le président Said qui affirme que tous les élections se sont déroulées à temps et que les présidentiels le seront aussi il n’a pas manquer de dénoncer l’attitude des opposants qui ont boycotté les élections précédentes et qui se préparent aux présidentiels. Faut-il comprendre que le président Said veut une participation minimale des présidentielles ? il est vraiment difficile de l’affirmer vu que ce dernier n’avoue pas ses faiblesses et n’est pas si naïf pour ça, le plus probable que ces propos sont pour faire croire de l’existence du rendez- vous électorale ou pour que l’opposition y participe massivement pour éviter un nouveau record mondial d’abstention ; de toute façon le taux de participation est toujours la hantise des dictateurs et le seul défi des élections sous leurs règne même s’il n’hésite pas à le gonfler lui aussi .
Le porte-parole de l’ISIE remonte au créneau en mai 2024 pour annoncer 3 dates possibles à savoir le 06, le 13 ou le 20 octobre 2024 et que l’ISIE se penche sur les conditions de candidature
Le communiqué de la présidence hier vient confirmer la première hypothèse avancée par l’ISIE mais est-ce que la tenue des élections le 06 octobre 2024 respecterait la durée de mandat présidentiel comme fixée constitutionnellement ?
C’est un autre point que tout le monde semble négliger c’est que les élections présidentiels peuvent être en deux tours et c’est le plus probable du coup le respect du mandat présidentiel doit prendre en compte ce fait c’est-à-dire au délai de 3 mois de l’article 101de la loi organique 16/2014 on doit ajouter presque un mois pour le deuxième tour dont 22 jours de compagne électorale de ce tour comme le prévoit l’article 50 de la même loi organique donc au lieu d’attendre 3 mois avant le jour du scrutin .Il faut plus tôt attendre 4 mois pour respecter le quinquennat présidentiel prévu à la constitution ou plutôt les deux constitutions qui sont sensé de rang supérieur que la loi organique mais la hiérarchie des normes est une complication inutile pour le régime en place. On peut affirmer que Kais Saied dépassera son mandat présidentiel contrairement à ce que beaucoup déclarent et même si le délai de l’article 101 de la loi 16/2014 sera respecté le mandat de Kais Saied dépassera le délai constitutionnel le 07 octobre 2024 il est peut probable qu’on aura un président théoriquement du moins.
L’ISIE serait-elle en désaccord avec le président ? certains l’affirment soutenant que l’armé ou les occidentaux contraignent Kais Said à respecter au moins formellement la tenue des présidentielles. Faute d’être dans les secrets des dieux, on ne peut que nuancer ces propos logiquement l’armé qui a fermé le parlement avec un char ou l’union européenne qui semble même détourner ces propres règles internes pour soutenir Kais Said ou les états Unis qui financent l’armé tunisienne n’ont pas d’intérêts si apparents et directs pour entrer dans ce genre de bras de fer avec le régime en place en Tunisie surtout qu’ils n’ont pas de solution de l’après Kais Said et ils ne sont pas réputé pour jouer du Poker dans ce genre de questions surtout dans une conjecture internationale aussi instable. Ceci bien sûr n’exclut pas un changement par les élections du président de la République mais c’est l’état profond qui serait le protagoniste ce n’est pas le processus démocratique ou la volonté des électeurs puisque de toute façon les dés sont pipés.
Avant de s’intéresser au comment on ne doit pas négliger même après la déclaration de la présidence que le décret pour la convocation des électeurs est signé et que le premier tour sera le 06 octobre 2024 que le recours de Kais Saied à l’article 90 de la constitution 2022 que Kais Said est sensé respecté prévoit « Si les élections ne peuvent avoir lieu à la date prévue, en raison d’une guerre ou d’un danger imminent, le mandat présidentiel est prorogé par une loi, jusqu’à ce que les causes qui ont engendré le report des élections cessent d’exister. » donc si Kais Said entend ajourner les élections ce qui est logique pour un messie comme lui ,s’il prête attention aux risques de vote sanction contre lui ,il doit y a voir une guerre ou un danger imminent ou faire un semblant de guerre ou de danger imminent .Pour ce qui est de guerre on voit mal comment il provoquera une , mais pour le danger imminent dont il a une sulfureuse expérience le problème des émigrants pourrait bien faire l’affaire surtout le récit conspirationniste du grand changement que ses outils martèlent en lui faisant écho et la mise sur la peur semble bien agir sur une partie de la population tunisienne ce qui explique l’inertie des forces de l’ordre par moments et endroits pour attiser la tension entre la population locale et les émigrants même si les statistiques officielles communiqués par l’ex ministre de l’intérieur à une commission parlementaire démontre que le seul complot sur la question était bien de Kais Said puisque leur nombre une vingtaine de milliers ne peut former une argumentation plausible pour l’existence de complot du grand changement mais cette théorie est maintenant protégé judiciairement . Mais avec la résurgence de la droite européenne la tolérance avec le président de Kais Said, malgré quelques reproches pour la consommation intérieure , n’est plus à prouver et qui peut le plus le 25 juillet 2021 peut le moins aujourd’hui que ce soit le président Kais Said ou ses curieux alliés européens Georgia Meloni en tête vu l’efficacité des services de garde-frontières européenne du dernier et qui ont contribué à un certain succès de la droite européenne et plus précisément l’extrême droite italienne.
De toute façon pour Kais Said il ne suffit de rien pour qualifier une circonstance de danger imminent le problème c’est l’ambiguïté du texte, il n’y a aucun critère ni contentieux pour protester pour la qualification de ces causes ou leur cessation d’autant plus que le délai de report est indéfini ça peut partir vers l’inconnu surtout avec un récidiviste comme le président Said.
Pour la date choisie pour les élections bien sur ce n’était pas anodin le 06octobre 2024 tout d’abord c’est une période ou tous les regards du monde seront sur la campagne électorale présidentielle américaine si décisive pour prévoir les relations internationales voir le sort de la planète pour les prochaines années si ce n’est pas les prochaines décennies donc la diversion est garantie sans oublier que ce serait un mois aussi après “ les présidentielles” Algériennes.
Ensuite pour la symbolique de la date, bien sur pour le président Saied l’histoire et les symboles sont des obsessions le 06 octobre est la date d’une guère israélo-égyptienne[2] ou l’armée Égyptienne a réalisé un exploit historique au début de la guerre en traversant le canal de Suez et s’emparant de la ligne Braliev au Sinai occupé. La date pourrait avoir être choisie pour exprimer la dimension nationaliste et panarabe de Kais Saied mais il ne faut pas oublier non plus que cette guerre a fini par le traité de Camp David et la normalisation des relations entre l’Egypte et Isarel donc le clin d’œil pourrait bien être adressé à l’administration Américaine et le prochain mandat de Saied on assisterait au ralliement de la Tunisie aux conventions dite d’Abraham.
2. “comment ?” Le contexte, les dés sont pipés
L’examen aussi bien du contexte général que du cadre juridique électorale révèle des violations des droits de l’homme et des aberrations incompatibles avec la tenue d’élections libres et impartiale.
La bonne gestion électorale suppose avec les textes de loi un contexte générale adéquat a la pratique démocratique avec tout ce qu’il va avec de garanties des droits de l’homme.
Démocratie et influence étrangère
Tout d’abord il ne faut pas oublier que tout est parti d’un changement inconstitutionnel de pouvoirs le 25 juillet 2021 et c’est une sentence d’une Cour compétente qui apporte cette qualification et ce n’est pas un coup de force comme préfère le qualifier la diplomatie courtoise jusqu’à la complicité des chancelleries qui malgré toutes critiques trouvent un moyen d’établir des relations certes pas chaleureuses mais efficaces la patate n’est pas si chaude qu’on peut l’imaginer. La réaction des Américains et des européens aux simulacres de consultation électronique, de referendum, d’élections législatives et locales est révélateur du soutien dont jouit le régime en place malgré l’opinion de la commission de Venise et la démarche autoritaire évidente de Kais Said seul le parlement européen a réagi en boycottant les législatives, les autres à part quelques communiqués n’ont aucun problème à soutenir non pas la Tunisie mais le président et son régime. Certes ce n’est pas gratuit mais ça révèlerait la réaction des gouvernements dont la relation avec eux est vitale pour tout régimes tunisiens. Si le président Kais Said ou le régime en place viennent à fausser massivement les élections présidentielles surtout si les résultats sont déjà approuvés par les différends pays influents en Tunisie leurs complicité du moins tacite ne tarderait pas.
Sur le plan national la tendance qu’a révélé la pratique politique et même législative du pouvoir par le président Kais Said après le coup d’Etat du 25 juillet 2021 se caractérise par l’exclusion voir la diabolisation des corps intermédiaires, les partis politiques en premier plan sont inculpés dans le discours officiel du président de tous les maux qu’a connu et connait la Tunisie corruption , favoritisme, trahison, espionnage et clientélisme bref tout ce qui est condamnable et bien sûr ils sont les auteurs de tous les complots que le régime en place en voit partout . Il est vrai qu’avant le 25 juillet 2021 les acteurs politique sont loin d’être considéré comme des enfants de chœur par les Tunisiens mais le martèlement d’accusations à tort et a travers par le régime et les restrictions de leur action a fini par les user surtout avec leur refus chronique de s’unir contre la dictature.
Même les acteurs politiques élus qui ont prêté allégeance à Kais Said ne sont pas en mesure de pratiquer aucun pouvoir ni prendre des décisions. En effet l’architecture du pouvoir selon la constitution de kais Said se résume en un président omnipotent qui contrôle tout et exprime exclusivement la volonté et la souveraineté du peuple et à coté de cette super institution quelques formations de représentation formelle qui ne peuvent mettre en question ni les décisions ni la responsabilité du président de la République.
Devant l’absence de vrais contrepouvoirs législatifs et l’hégémonie de l’exécutif il serait opportun de s’intéresser à la magistrature et aux médias comme garanties essentielles dans une société démocratique propice à un contexte électoral sain.
La magistrature
Pour la magistrature le président Kais Said s’est retracté le 25 juillet 2021 aprés avoir annoncer prendre le contrôle du ministère public lors de son discours de proclamation de l’état de l’exception mais il n’a jamais renoncé et après plusieurs menaces publiques et l’instrumentalisation de la justice militaire, le président Kais Said a pu la neutraliser en deux temps avant de la mettre au pas.
Deux décrets-lois ont achevé l’indépendance fragile de la magistrature en Tunisie le le 12 février 2022 le décret-loi présidentiel n11/2022 a été publié dans le journal officiel n°16 du 13 février 2022, le dit décret -loi a instauré un conseil supérieur provisoire de la magistrature qui remplace le conseil suprême permanent existant, élu et légal et a annulé les prérogatives d’auto-gérance auquel le conseil légal jouissait. L’assemblé générale des conseils judiciaires a été aussi supprimée. Le décret-loi a modifié la composition du conseil pour exclure les membres élus magistrats, avocats, enseignants universitaire et huissiers pour les remplacer avec des membres en leurs qualités et des membres nommés du président de la République et le président du conseil revient un membre en sa qualité et n’est plus objet d’élection abolissant ainsi le principe d’élection aux magistrats et autres membres.
Le décret-loi a attribué au président de la République et au ministre de la Justice et même au chef du gouvernement des compétences qui représente une ingérence dans la carrière professionnelle et la discipline des magistrats.
Le président de la République qui cumule et incarne le pouvoir exécutif et législatif ne s’est pas contenté des prorogatifs déjà exorbitantes qui s’est octroyé il a promulgué le décret-loi 35/2022 du 1er juin 2022, et c’est le deuxième texte, pour s’octroyer aussi la prérogative de limoger tout magistrat sans aucune procédure disciplinaire préalable ou même le respect du principe du contradictoire en se basant sur des rapports de sources inconnues. Dans le même journal officiel il décrète le décret n° 516/2022 en application du décret-loi publié le même soir 53 magistrats se sont vu révoqués après un lynchage public que le président leur a réservé au conseil des ministres le même soir pour annoncer les textes. C’était un vrai carnage puisque même ceux qui ont obtenus des décisions de sursis d’application du tribunal administratif n’étaient pas réintégré à ce jour. Au-delà des révoqués la leçon a bien été comprise par les juges en exercice qui se sont mis au pas du régime surtout que le président n ’hésite pas à les menacer d’une deuxième vague d’assainissement selon son expression et même son conseil supérieur de magistrature n’est plus fonctionnel faute de quorum. C’est la ministre de Justice qui fait désormais la loi, elle décide les mutations, les suspensions et les nominations par simple note de service en se basant sur une loi abrogée, il va sans dire que c’est la politique de la carotte mais surtout du bâton qui rythme son action ainsi on a vu des magistrats suspendu ou muté pour des décisions judiciaires qui déplaisait au régime. Sans établir une autopsie complète la magistrature n’est plus un corps chargé de finir le travail ordonné par les cercles du pouvoir et qui ne décide rien d’une façon souvraine ou autonome.
La liberté d’expression et de la presse
Comme la justice la presse et les médias ont eu droit à un décret c’est le tristement fameux décret-loi présidentiel n°54/2022 Du 13 septembre 2022, relatif à la lutte contre les infractions se rapportant aux systèmes d’information et de communication plus exactement son article 24 censé lutter contre les fakes news et les rumeurs le texte puni d’une façon disportionée jusqu’10 ans de prison ferme. L’application de l’article 24 a été encore plus liberticide que son contenu en effet et à la tout va un simple avis peut exprimer sur un compte face book peut valoir une condamnation a des mois voir des années d’emprisonnement de la façon la plus absurde. En fait en compte plus les victimes du décret-loi 54 blogueur, internaute, étudiant, caricaturiste, artiste, citoyen lambda et aussi et bien sur les dissidents de tout bord politique et les activistes de la société civile et bien sur l’application de cet article est à sens unique les pro-Kais Said ne sont pas traduits malgré les plaintes déposé contre eux . Même les journalistes qui sont juridiquement responsable à la base d’un texte spécial sont aussi traduit pour violation de cet article bateau de toute façon le procès n’est plus si déterminant du sort de l’inculpé. Ainsi des journalistes comme Mohamed Boughaleb , Mourad Ezghidi , Borhen bssaies et Me Sonia Dehmani et d’autres sont derrière les barreaux avec des poursuites en cascade. Bien sur comme c’est le cas pour la magistrature la leçon est bien assimilée la peur et l’autocensure règne même pour les quelques exceptionnels foyers de résistance. Pour Kais Saied en bon disciple de Makiavel il vaut mieux être craint qu’aimé.
Les procès politiques
Autre aspect du funeste panorama de libertés publiques en Tunisie les procès politiques en effet le régime de Kais Saied excepté quelques affaires devant le tribunal militaire qu’on croyait ciblées et exceptionnelles a été dans un premier temps assez tolérent avec les critiques et les contestation de son œuvre mais à partir de février 2023 l’attitude a radicalement changé avec l’arrestation de plusieurs opposants de différents partis politiques et des hommes d’affaires c’est l’affaire dites de complot contre la sureté de l’état que les comités de défense des inculpés dénoncent les violations d’ordre procédural et l’absurdité substantiel cela n’a pas empêché le juge d’instruction du pole antiterroriste et veuillez comprendre le régime d’élargir la liste des inculpés et pour dissimuler les aberrations on a interdit le traitement médiatique de l’affaire mais cela n’a pas empêché d’autres anomalies a tel point qu’il est claire que le régime est dans une logique d’exhibition et il se permet d’enfreindre les règles les plus élémentaire comme le dépassement du délai maximal de la détention provisoire ou l’interdiction de visite aux avocats …
La…. Du juge d’instruction comme d’ailleurs la décision de la chambre d’accusation et la médiocrité du travail même pour la seule rédaction traduit le caractère imposé et mal tramé de l’affaire qui est loin d’être la seul ainsi Me Abir Moussi présidente du parti néo-destourien qui s’est vue poursuivi et détenue pour des inculpations aussi absurdes qu’infondue et le président du parti Enahdha Rached El Ghanouchi qui détenu aussi comme beaucoup d’autres. La déclaration de la volonté de se porter candidat aux présidentielles devient synonymes de poursuites judiciaires en vu ce qui a été vrai pour plus d’un des potentiels candidats.
Le contexte électoral .. La loi et l’instance électorales « présidentielles »
On pourrait dire que tout ça était en relation avec le danger éminent que le président essaye d’éradiquer et que les élections présidentielles en fin de compte est une tache de l’ISIE et tant qu’elle ne peut pas falsifier les bulletins de vote la démarche est démocratique ce raisonnement simpliste et superficiel ne tient pas la route car les élections et leur caractère …dépend du contexte avant les formalités du scrutin .Mais tant qu’on s’est proposé de traiter du contexte on doit s’intéresser au contexte juridique c’est à dire la loi électorale et l’instance elle-même.
Autre domaine altéré par l’anarchie juridique de l’après 25 juillet 2021 puisque l’intervention du président Kais Said en tant que législateur auto proclamée par le décret 117/2021 va se manifester plus d’une fois alors que la constitution de 2014 exige que les textes de la loi électorale prennent la forme de loi organique d’ailleurs même la constitution élaborée par le président Kais Said l’exige mais bien sûr il n’a pas de gêne à l’ignorer.
Par textes unilatéraux dans leur conception, validation et promulgation le président-Etat dénature l’instance et la loi électoraux et bien sûr enfreint au passage la hiérarchie des lois puisque ces super décrets et décrets lois modifie et abroge des lois organiques, elles sont supra-constitutionnelles de toute façon qui le plus peut le moins.
Le 21 avril 2022 un décret-loi présidentiel est promulgué sous le n°22/2022 modifiant la loi organique relative à l’Instance supérieure indépendante des élections ce texte a changé le nombre des membres de l’ISIE et la durée de leur mandat mais surtout le président s’est arrogé la prérogative de nommer les membres de l’ISIE ce qui achève définitivement son indépendance car l’indépendance des instances ou organes chargé des élections se mesure par rapport à leur relation surtout avec l’exécutif en cas il n’y a rien a commenté l’ISIE est indéniablement dépendante et soumise à la présidence de la république le seul pouvoir exécutif en Tunisie après le 25 juillet 2021 si ce n’est pas le seul pouvoir tout court.
Un autre aspect à dégager de ce décret- loi 22/2022 c’est la recherche d’épargner les membres des poursuites en leur conférant une immunité qui garantie presque qu’on cas de fraude ou violations des normes qui cadrent leurs interventions bien sûr ils sont responsables seulement devant le président de la République qui a déjà limogé deux membres. En revanche les pouvoirs au sein de l’ISIE sont plus concentrés entre les mains de son président nommés par le président. Pour résumer l’ISIE est devenue l’instance présidentiel pour les élections autrement dit pour les élections surtout les présidentielles le président Kais Said est structurellement et institutionnellement juge et partie.
Accaparer l’instance électorale ne semblait pas satisfaire le projet du président il intervient toujours avec ses décrets-lois pour modifier la loi électorale ainsi le 01 juin 2022 le décret-loi présidentiel 34/2022 et le 15 septembre 2022 viennent modifier la loi organique 16/2014 relative aux élections et au referendum pour les mêmes fins à savoir contrôler la volonté des électeurs et moins de transparence et de démocratie.
Avec tout ces interventions du président de la République lui-même sans aucun débat avec qui que soit encore moins un débat sociétal ou un processus collégiale instaure les nouveaux règles du jeu qui réduisent le processus électoral a une formalité nécessaire pour une vitrine démocratique si ce n’est un étal pour donner l’illusion d’une image d’un semblant démocratique requise pour rester fréquentable au vue de certains gouvernements et organisations internationales indispensables pour la survie du régime . dans se cadre il est utile de rappeler que la commission de Venise et la Cour africaine des droits de l’homme ont condamné l’œuvre de Kais Said de détricotage des acquis démocratique en Tunisie d’ailleurs la dite Cour a ordonné le retour à la démocratie constitutionnelle et c’est sur cette base que le parlement européen a décidé avec une large majorité de boycotter les élections législatives de 2022 ces élections sont d’ailleurs objets de pas moins de 3 affaires courantes devant la Cour Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples.
Les déclarations des responsables de l’ISIE pour les préparations aux éventuelles élections présidentielles ne présagent rien de correcte quand aux respect des normes constitutionnelles puisqu’on annonce que l’adaptation de la loi électorale aux nouveaux conditions de candidature édictés par la nouvelle constitution sera faite par une décision règlementaire qu’elle va prendre ce qui va à l’encontre de la constitution qui fait de la loi électorale un domaine exclusif des lois organiques et la règle de parallélisme des formes car bien qu’elle est doté de pouvoir réglementaire les décisions de l’ISIE ne peuvent modifier un texte hiérarchiquement supérieur même au fond l’exclusion excessif et la ségrégation à l’encontre d’une catégorie de citoyens et le soupçon qui plane autour de l’instrumentalisation de la condition de la présentation du bulletin n°3 nourrit l’ inconfiance qui règne même si tout le processus électorale est discrédité ab initio les anomalies qu’on a évoqué. Pour le comment donc ni les textes ni les contextes ne peuvent permettre la tenue de vrais élections présidentiels ou aucun minimum de démocratie, transparence, droits de l ‘homme , libertés publiques et égalité entre les candidats n’est garanti voir possible.
[1] C’est sur la page Facebook de la présidence de la république que le communiqué est publié le 02/07/2024 mais pas encore publié au JORT.
[2] C’était en 1973 connue aussi du nom de la guère de Ramadhan ou la guerre de Kipour pour les Israéliens.