L’Union générale tunisienne du travail (UGTT), principale confédération syndicale du pays, a officiellement déclaré une grève générale nationale prévue pour le 21 janvier 2026. Cette décision unanime a été prise lors de la session du Conseil administratif national qui s’est tenue les 5 et 6 décembre 2025, sous la présidence du secrétaire général Noureddine Taboubi. Cette action syndicale imminente dans tous les secteurs en Tunisie est principalement une réponse à l’aggravation du déclin socio-économique, à la cessation du dialogue social gouvernemental et aux violations signalées des libertés syndicales.
Une période de tensions accrues
Dans un communiqué publié à l’issue de ses délibérations, l’organe exécutif de l’UGTT a présenté une évaluation sévère de la situation actuelle en Tunisie. La confédération a souligné les tensions politiques et sociales persistantes, ainsi que la détérioration continue du paysage économique du pays.
Une préoccupation particulière a été exprimée concernant ce que l’organisation qualifie de mise en place d’un cadre autoritaire restrictif. Ce système se caractériserait par une intensification des arrestations et des poursuites visant les membres syndicaux, les défenseurs des droits humains, les professionnels du droit, les professionnels des médias, les commentateurs numériques et les personnalités politiques.
Actions en justice contre des représentants syndicaux
Le communiqué détaille plusieurs condamnations prononcées à l’encontre de responsables syndicaux de premier plan, citant notamment Senouki Essoudi, secrétaire général du syndicat régional de Kasserine, et Haithem Mahjoubi, secrétaire général de l’Union générale de la justice, des domaines de l’État et des propriétés foncières. En outre, de nombreux autres syndicalistes auraient fait l’objet de poursuites judiciaires, de licenciements ou de mutations arbitraires dans divers départements gouvernementaux et secteurs économiques. L’UGTT interprète ces mesures comme des tactiques coercitives visant à entraver l’exercice légitime des activités syndicales.
Dialogue social au point mort
La confédération syndicale critique les autorités pour leur refus persistant d’engager un dialogue constructif, leur aversion pour la négociation et l’exclusion systématique de l’UGTT de toutes les décisions politiques concernant la main-d’œuvre. L’un des principaux griefs concerne l’insertion unilatérale de l’article 15 dans la loi de finances, qui propose une augmentation salariale prétendument négligeable sans consultation préalable. Selon l’UGTT, cette mesure représente une initiative historique sans précédent, visant à réduire le rôle crucial du syndicat dans la défense des droits économiques et sociaux des travailleurs.
Parallèlement, dans le secteur privé, la principale fédération patronale, l’UTICA, aurait refusé d’engager des discussions sur les ajustements salariaux pour 2025, bloquant ainsi les processus de négociation collective tant au niveau organisationnel que financier.
Une situation socio-économique grave
Le communiqué souligne l’érosion croissante du pouvoir d’achat de la population active et de l’ensemble des citoyens. Ce déclin est attribué aux pressions inflationnistes, à l’augmentation du coût de la vie, à la dégradation des services publics et aux pénuries récurrentes de médicaments essentiels et de produits de première nécessité. L’UGTT accuse l’État de se désengager de ses responsabilités sociales et réglementaires fondamentales, favorisant ainsi les pratiques monopolistiques et ne répondant pas de manière adéquate aux besoins essentiels de la population tunisienne.
Principales revendications de la confédération syndicale
En réponse à cette crise multiforme, l’UGTT a formulé plusieurs revendications urgentes. Elle préconise une rectification du climat politique par la cessation des poursuites judiciaires arbitraires, l’annulation des condamnations qu’elle juge injustes, l’abolition du décret 54, la libération des prisonniers d’opinion et le rétablissement des libertés fondamentales.
La confédération demande également la reprise immédiate des travaux du Conseil national du dialogue social, le lancement rapide de négociations concernant les revendications matérielles et organisationnelles des travailleurs, et la mise en œuvre intégrale des accords précédemment conclus. Pour le secteur privé, l’UGTT insiste sur le droit des travailleurs à des augmentations salariales pour 2025 et les années suivantes, ainsi que sur une révision complète des conventions collectives sectorielles et intersectorielles existantes.
Mobilisation soutenue
Le Conseil national administratif a souligné que cette déclaration de grève générale s’inscrit dans la lignée des résolutions adoptées lors de ses précédentes sessions des 5, 6 et 7 septembre 2024, ainsi que lors de la réunion du 11 novembre 2025. L’organe exécutif a annoncé son intention de rester en session permanente, laissant entrevoir la possibilité de nouvelles actions si ses revendications ne sont pas satisfaites.
Cette grève générale prévue le 21 janvier 2026 devrait marquer un tournant dans la confrontation actuelle entre la principale confédération syndicale et les autorités tunisiennes, sur fond de profondes divisions sociétales quant à l’orientation socio-économique future du pays.







