Le Chef du gouvernement Hichem Mechichi a déclaré avoir adressé une correspondance au président de la République l’appelant à fixer une date pour la tenue de la cérémonie d’assermentation de sa nouvelle équipe. A noter qu’il y a deux jours, le Président de la République Kaïs Saïed avait déclaré tenir à ses principes et a laissé entendre qu’il ne changera pas de position au sujet de la prestation des nouveaux ministres.

Chronologie des faits

Contrairement aux « rumeurs » qui ont circulé concernant une éventuelle réunion entre Hichem Mechichi et Kaïs Saïed à propos de la prestation des nouveaux ministres, aucune entrevue n’a eu lieu aujourd’hui à ce sujet. C’est ce qu’a confirmé aujourd’hui, vendredi 05 février 2021 Hichem Mechichi sur les ondes de radio Mosaïque Fm. Le chef du gouvernement a, en outre, expliqué qu’aucun refus officiel pour la tenue de la cérémonie d’assermentation n’a été formulé par le Chef de l’Etat. Il a ajouté que Saïed n’a pas explicitement manifesté le rejet des nouveaux ministres et n’a pas donné, non plus, d’explications quant au retard observé pour la tenue de la cérémonie précitée. Retard qui, selon les dires Mechichi, a provoqué un blocage dans le travail des structures de l’État surtout dans un contexte économique et sanitaire difficile.

Notons que lors de sa rencontre le 03 février, avec Noureddine Tabboubi, secrétaire général de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) au Palais de Carthage, le président de la République a laissé entendre que s’il « demeure ouvert au dialogue, il n’est aucunement prêt à revenir sur ses principes ». Une déclaration qui a été interprétée par la majorité des observateurs comme une réaffirmation de son refus d’inviter certains ministres à prêter serment.

Le fossé se creuse

Dans une occasion antérieure, plus exactement le lundi 25 janvier 2021, où la réunion du Conseil de la sécurité nationale a été tenue au palais de Carthage, Kaïs Saïed a indiqué que le remaniement ministériel annoncé Hichem Mechichi, n’avait pas respecté les procédures prévues dans l’article 92 de la constitution. Tout en désapprouvant l’absence de femmes dans le nouveau gouvernement, il a manifesté son refuse d’être témoin lors de la prestation de ministres autour desquels il y aurait des soupçons.

Le lendemain, tard dans la soirée du 26 janvier, la nouvelle équipe de Mechichi, qui contient 11 nouveaux ministres, réussit à obtenir la confiance au Parlement. Cependant, et contrairement à l’accoutumée, aucune invitation n’a suivi de la part du président de la République pour recevoir les nouveaux ministres. A noter que la Constitution implique que tout ministre ne peut exercer qu’après avoir prêté serment devant le Président de la République et après avoir été nommé sous un ordre présidentiel. Sauf que cette étape n’a toujours pas eu lieu, d’oùla situation de blocage.  

L’opinion publique s’attendait à ce que Hichem Mechichi tente de s’entretenir avec le Président de la République pour trouver une issue à cette situation de blocage. Or, c’est avec les représentants des partis formant le Coussin Politique du gouvernement que Mechichi s’est entretenu aujourd’hui. L’entretien avec le Président s’est réduit à une requête écrite sous forme de correspondance adressée à la Présidence.

Piégé

Comment Saïed va-t-il riposter ? Certains observateurs commencent déjà à prédire la suite. C’est notamment le cas de Fatma Mseddi, ancienne députée et activiste politique qui trouve qu’en continuant sa fuite en avant, Mechichi est tombé dans le piège.  « Il est clair que le chef du gouvernement est en train d’exécuter les ordres d’Ennahdha. Ce parti n’a-t-il pas publié un communiqué qui appelle au passage en force du remaniement ! Et au lieu de choisir le dialogue et la voie des négociation, Hichem Mechichi a choisi la manière frontale en adressant une correspondance au président. A mon avis, on l’a poussé dans cette voie et il va en sortir perdant. En agissant de la sorte, il a ruiné toutes ses chances de négocier. Je suis, d’ailleurs, étonnée de voir que tous les Tunisiens ont compris le refus de Saïed et que le chef du gouvernement demeure le seul à ne pas admettre que la non tenue de cette sacrosainte cérémonie d’assermentation n’équivaut pas à un franc refus ! Maintenant le chef du gouvernement va devoir assumer les conséquences de ses choix parce que je suis persuadée que Saïed ne va pas changer de position. Il va laisser les choses en suspens jusqu’à une date indéterminée. Et dans ce cas ou bien Mechichi optera pour les mesures exceptionnelles, ce le poussera directement vers une voie non constitutionnelle avec des travaux nuls de point de vue légal, ou bien encore il va finir par lâcher et démissionner. Et dans les deux cas il est tombé dans le piège des partis qui l’ont poussé vers ce scénario ».

Yosr A.