Par : Kamel Zaiem

Au Bardo, les chasseurs de nouvelles sont restés sur leur faim. C’est que le show tant attendu n’a pas eu lieu. Les raisons ne sont pas encore révélées, mais les organisateurs et les « artistes » n’étaient pas là, au Bardo, comme ils l’ont promis tous ces derniers jours.

Il n’a pas convaincu

Les lieutenants chargés de la réalisation de ce show, avec à leur tête Ayachi Zammel, le député du Bloc National, vont à présent devoir rembourser les spectateurs qui ont été sur place sans trouver les traces de ce spectacle attendu, demander pardon aux forces de sécurité qui se sont mobilisées en masse autour du siège du Parlement en prévision de ce show et aux médias qui ont tout lâché pour se concentrer sur l’événement du jour qui, finalement, n’a été qu’un canular !

Ayachi Zammel a mis du temps pour retrouver le bon sens

Ayachi Zammel, toujours lui, était le premier à faire volte-face et à laisser tout son monde hors-jeu. Pour quelles raisons s’est-il retracté ? Ses réponses ne semblent convaincre personne : « J’ai décidé de ne pas participer à cette initiative ! Il y a des campagnes de mobilisation et d’incitation à l’encontre des députés ! Je me rendrais à l’ARP la semaine prochaine ! », a-t-il révélé en première réaction avant de nous révéler d’autres vérités : « Des députés, adhérant au communiqué du 29 septembre 2021, se sont rétractés. Nous pouvons opter pour d’autres moyens technologiques tels que la tenue de réunion à distance ».

La technologie, à défaut du bon sens

Eh oui, nos honorables parlementaires, qu’on accuse de conservatisme et de manque de connectivité avec les dernières nouveautés technologiques, viennent de nous prouver qu’ils sont bien à la pointe du progrès et qu’ils maîtrisent parfaitement les plus récentes des solutions électroniques, puisqu’ils ont décidé, selon le même député, d’opérer à distance sans risque de confrontation avec les forces présentes au Bardo, là où il n’y avait pas uniquement la police, mais également des foules qui ont débarqué pour chasser les députés en colère.

C’est dire que les députés, déjà privés des salaires du mois de septembre, ne vont sûrement pas être payés pour le mois d’octobre. La législation du travail parlementaire n’a pas prévu, à priori, de payer le… télé-travail !

Et si Zammel a quelque peu tremblé au moment de mettre ses promesses à exécution, ce n’était pas le cas de Mohamed Goumani, le député nahdhaoui qui était venu sur place tout de même et essayé d’entrer au Parlement avant de se voir prier de faire demi-tour par les policiers en place. Celui qui a été chargé par le cheikh Rached Ghannouchi de sauver la barque du parti islamiste, menacé par les nahdhaouis en colère, avant de se désister à son tour, était venu au Bardo pour reprendre le travail après avoir profité de ses vacances. Oui, comme ça, comme si de rien n’était !

Il est évident, aujourd’hui, que les députés signataires du communiqué de cette curieuse reprise mesurent le non-sens de leur action. Ils sont conscients, même s’ils ne le montrent pas, que le Parlement de 2019 fait déjà partie de l’histoire.

La balle est dans le camp de Saïed

L’affaire de ce retour parlementaire classée après l’avortement de l’essai, Kaïs Saïed peut-il en gagner quelque chose ?

A vrai dire, le président de la République n’avait rien à craindre de cette initiative vouée à l’échec dès son annonce. Et Saïed semble avoir d’autres chats à fouetter beaucoup plus importants que ceux du Bardo.

Bouden est là, et après ?

Après avoir été l’auteur d’un coup de maître avec la nomination de Najla Bouden au poste de cheffe du gouvernement, le Président n’est pas au bout de ses peines car il aura d’autres défis, et non des moindres, à relever dans des délais très courts.

Jusqu’à présent, les citoyens continuent à soutenir leur président qui a osé les libérer du joug des nahdhaouis et de leurs complices, mais ils attendent encore plus à tous les niveaux, particulièrement ceux de l’économie, de la paix sociale, de la vision de Saïed et Bouden concernant la manière de gouverner et la nature du système politique qui sera mis en place.

Craintes légitimes

Ceux qui craignent pour les libertés et la démocratie n’ont pas tort et ils vont garder un œil sur tout ce qui se passe et se décide à Carthage. Celui qui a été élu en 2019 à une écrasante majorité n’a pas le droit de décevoir ses partisans. Or, jusqu’à présent, ils ne voient rien venir. On parle beaucoup de guerre contre la corruption mais, pratiquement, on ne voit rien bouger. Dans les départements de la justice, des dossiers brûlants trainent encore et ils demeurent intouchables jusqu’à présent. Côté économie et finances, la situation ne fait que s’aggraver alors que rien ne semble bouger pour mettre au clair les lois de finances de 2021 et 2022.

Saïd a pris l’habitude de prendre tout son temps avant de réagir, mais face à certains dossiers, ce déambulement est à éviter. Le temps est à l’action pour rassurer et pour pouvoir aller de l’avant comme le peuple le veut pour de bon…

K.Z.