Par: Kamel Zaiem

Tout a commencé au début de l’année 2020 lorsque l’Europe fut dévastée par le coronavirus, ce virus tueur et impitoyable qui allait emporter par la suite des millions d’âmes à travers le monde.

Chez nous, en Tunisie, nous nous flattions de nos statistiques avec zéro cas positif à l’issue d’une première vague qui a quasiment épargné la Tunisie. Les appréhensions et les craintes à cause des moyens très modestes dans nos hôpitaux, déjà incapables de gérer les exigences quotidiennes ordinaires, faisaient craindre le pire, mais tout s’est merveilleusement bien passé au point de faire de la Tunisie un exemple dans la lutte contre le Covid-19.

Et ce n’est qu’à partir de la fin du mois de juin 2020 que tout ce qui a été fait durant des mois s’est malheureusement effondré. Les frontières ont été rouvertes sans prendre les précautions qui s’imposaient et le gouvernement en place a pris trop à la légère le risque d’ouvrir les portes aux visiteurs, Tunisiens et étrangers et, depuis, ce fut une nouvelle page noire dans la lutte contre le Covid-19 avec la succession de décisions et de contre-décisions aussi exhaustives, absurdes et saugrenues.

Toujours en retard

C’est dans cette confusion que la Tunisie a accueilli, à bras ouverts, la troisième vague d’un virus qui, à travers ses variants, devenait plus dévorant et plus assassin. D’une part, les hauts dirigeants politiques du pays n’ont pas vu venir la catastrophe, et ils eurent à l’affronter avec des moyens dérisoires et des caisses vides à tous les niveaux d’autre part.

Au moment où certains pays voisins ont déjà commencé à faire des commandes des vaccins de plus en plus disponibles et efficaces, la Tunisie, plongée dans une crise politique sans fin et un effondrement économique sans précédant, n’a pas prévu de réserver un budget pour l’acquisition du vaccin par la faute d’un gouvernement beaucoup plus soucieux de régler ses comptes avec ses détracteurs que d’anticiper et faire le nécessaire pour assurer la liquidité pour l’octroi d’une quantité suffisante de vaccins.

Du coup, les portes de l’enfer se sont ouvertes et nous nous sommes trouvés avec  des milliers de cas enregistrés chaque jour même si les statistiques du ministère de la Santé, parfois ambigus et à la limite du croyable, n’arrivent pas à rassurer.

Et au moment où les premiers lots de vaccins commencent à débarquer, grâce essentiellement aux conventions avec l’OMS, nous avons eu à composer avec une stratégie très discutable pour entamer les campagnes de vaccinations alors que nous aurions dû apprendre des expériences des pays voisins et amis qui ont eu des mois d’avance sur la Tunisie.

Aujourd’hui, l’application eVAX, lancée depuis quelques semaines, n’arrive pas à donner pleine satisfaction. Des problèmes de logistique ont vite surgi pour perturber la bonne marche de cette plateforme, causant du retard dans le programme de vaccination.

Autre problème majeur, les centres de vaccination sont peu nombreux et ne tiennent pas compte du droit de tous les citoyens à accéder le plus vite possible au vaccin. Et il suffit de constater le désordre qui règne dans certains centres où les files ne manquent pas alors que ces gens, plus fragiles que les autres, doivent être beaucoup plus protégés.

Un  véritable scandale

Et comme si ça ne suffisait pas, les dernières révélations de Zouhair Maghzaoui, le député et secrétaire général du Mouvement Echaab viennent attiser une ambiance déjà morose et étouffante au milieu de ce climat pandémique. Selon ce député, environ 60 mille citoyens, déjà inscrits pour recevoir leur vaccin, viennent d’être retirés de la liste et ce sont les membres du gouvernement, leurs beaux-parents et leurs familles qui ont été vaccinés à leur place.

Vidéo AFP

Cette révélation a fait réagir Faouzi Mehdi, le ministre da la Santé qui a eu du mal à démentir l’information, affirmant que les membres du gouvernement doivent être protégés du Covid-19, comme si les autres citoyens, pour la plupart des personnes âgées atteints de maladies chroniques, ne méritent pas cette « faveur » d’être protégés et doivent faire l’effort pour « ne pas mourir » avant d’accéder au fameux sésame.

Il est vrai que les ministres, chargés de la gestion quotidienne des problèmes du pays, le Covid-19 en premier, ont droit de ce privilège, mais lorsqu’on jette aux oubliettes des milliers de citoyens ordinaires pour les remplacer par des amis et proches de ces responsables gouvernementaux, on peut évoquer, sans risque de nous tromper, un véritable scandale qui s’ajoute à ceux qui font désormais partie du décor.

K.Z