Dix organisations non gouvernementales (ONG), dont Avocats Sans Frontières, Le Pont Genève et No Peace Without Justice, ont appelé, dans un communiqué rendu public, samedi 16 janvier 2021, le président Kaïs Saïd à intervenir pour empêcher la levée du gel, prévue le mardi 19 janvier, de plus de 224 millions de francs suisses (683 millions de dinars tunisiens), planqués par le clan Ben Ali dans des banques suisses.
«Monsieur le président, un éventuel échec de l’État tunisien à récupérer ces biens restera une tache indélébile et déshonorante portant atteinte à la dignité de tous les Tunisiens et Tunisiennes, et une blessure incurable pour les nombreux citoyens dans la détresse et le désespoir», ont-elles souligné. Et d’ajouter : « Il est important dans ce cadre, de porter à votre connaissance l’existence de deux affaires pénales en cours, n°31 et n°35 qui sont examinées par les tribunaux pénaux spécialisés dans la justice transitionnelle, incriminant Mme Leila Ben Ali et tant d’autres de détournement de fonds publics et de corruption. Ces procès, Mr le Président, qui ont déjà commencé et ont atteint 3 audiences, ont le pouvoir d’étendre la durée du blocage des avoirs si seulement l’Etat exprime sa volonté de coopérer avec l’Etat Suisse dans le cadre de l’entraide judiciaire».
Les ONG parmi lesquelles figurent aussi le Forum Tunisien pour les Droits Économiques et Sociaux et le Réseau Tunisien de la Justice Transitionnelle ont également précisé, dans leur communiqué, que «l’argument de l’affaire en cours de jugement avec un certificat délivré du tribunal à l’appui constituera le meilleur argument juridique qui justifie le bon fondement de la demande de prolongement du gel des avoirs détournés par le clan Ben Ali».
Négligence et conflit d’intérêts
Les signataires du communiqué ont d’autre part fait remarquer que «pendant ces dix longues années, les gouvernants qui se sont succédé n’ont eu que négligence, conflit d’intérêts et mépris envers leurs propres citoyens dans le traitement de ce dossier qui aurait dû être considéré comme primordial, essentiel et urgent».
La Tunisie risque de perdre plus de 224 millions de francs suisses dinars détournés par le clan Ben Ali et bloqués en Suisse, en raison de l’expiration, mardi à minuit du gel de ces avoirs.
Le 19 janvier 2011, le Conseil fédéral suisse avait ordonné le blocage à titre préventif des avoirs en Suisse de Ben Ali et de son entourage, un gel dont la durée légale peut aller jusqu’à dix ans.
Selon le quotidien suisse Le Temps, le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) « a donné aux nouvelles autorités tunisiennes le temps nécessaire pour mettre en place une coopération judiciaire avec la Suisse ». Le DFAE a également précisé que «les autorités tunisiennes ont été sensibilisées durant l’année écoulée par les autorités suisses à plusieurs reprises et à divers niveaux de l’expiration prochaine du blocage administratif