Les ministres tunisien et syrien des Affaires étrangères Othman Jerandi et Fayçal Mokdad se sont rencontrés vendredi à New York en marge de la 76ème session de l’Assemblée générale de l’ONU à laquelle ils président tous les deux la délégation de leur pays. C’est la première rencontre entre des officiels des deux pays de  ce rang élevé depuis la rupture des relations diplomatiques survenue à l’initiative de l’ancien président provisoire Moncef Marzouki dans le sillage de la « conférence des amis de la Syrie » tenue à Tunis lors des déclenchements des révolutions du printemps arabe qui, partant de la Tunisie ont fait tache d’huile ébranlant le régime de Damas.

Relations de fraternité séculaires

Selon le communiqué du ministère tunisien des Affaires étrangères, de la Migration et des Tunisiens à l’étranger, la rencontre des deux ministres qui a eu en présence de du vice-ministre des affaires étrangères Bachar Jaafari et des membres des deux délégations a été l’occasion de passer en revue les relations de fraternité séculaires entre les deux pays et les deux peuples frères. Elle a porté aussi sur les développements de la situation en Syrie et le processus de règlement politique de la crise dans ce pays, ajoute communiqué du ministère tunisien.

On ajoute de même source que le ministre Jerandi a souligné que la Tunisie n’épargnera aucun effort pour contribuer efficacement au rétablissement de la sécurité et de la stabilité en Syrie de sorte à mettre fin aux souffrances du peuple syrien et à réaliser ses aspirations dans le but de sauvegarder son intégrité, sa souveraineté et son indépendance et de manière à lui permettre de reprendre son rôle et sa place naturelle dans l’espace arabe et sur les scènes régionale et internationale.

Le règlement de la crise syrienne

D’après le communiqué du MAE tunisien, le ministre syrien a passé en revue les développements de la situation dans son pays et l’ensemble des défis auxquels il fait face, affirmant sa considération et son respect pour les efforts déployés par la Tunisie en sa qualité de membre arabe au sein du Conseil de sécurité en vue d’impulser les efforts vers un règlement de la crise syrienne

Pour sa part, la presse syrienne d’information SANA a indiqué que les deux ministres ont affirmé « leur volonté de renforcer a coordination et la solidarité entre les deux pays pour défendre les causes justes de leur peuple ». Elle ajoute que Mokdad a discuté avec son interlocuteur la situation dans les deux pays et les développements dans la région soulignant que Jerandi a exprimé le souci de la Tunisie de voir se rétablir la stabilité et la sécurité totalement en Syrie.

Pour sa part, ajoute la même source le ministre syrien a exprimé sa conviction de la capacité du peuple et de la direction en Tunisie de surmonter les difficultés que traverse le pays et a expliqué les défis auxquels fait face la Syrie dans la phase actuelle.

Enfin conclut SANA les deux ministres ont mis l’accent sur la nécessite de la poursuite des contacts au service des intérêts des deux pays et des deux peuples frères.

A quand le rétablissement tant attendu des relations ?

Au-delà de cette langue diplomatique convenues, Il est à remarquer que c’est un ancien ministre du gouvernement de la Troïka à l’origine de la rupture des relations tuniso-syriennes qui a été le premier à prendre langue avec le chef de la diplomatie de Damas. En effet, on rappelle qu’Othman Jerandi a été le successeur de Rafik Abdessalem à la tête de la diplomatie tunisienne en mars 2013. Il a laissé son poste à Mongi Hamdi, nommé ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement de technocrates dirigé par Mehdi Jomaa, qui a dû batailler dur pour obtenir l’ouverture d’un consulat tunisien à Damas, le président provisoire de l’époque y était hostile.

En dépit des promesses faites par le candidat Béji Caïd Essebsi lors de la campagne électorale de 2014 de rétablir les relations avec la Syrie, celles-ci ont été maintenues en l’état l’ancien président invoquant une décision de la Ligue arabe à cet effet laquelle la Tunisie se doit de se conformer. Bien que la Sommet arabe de 2019 se soit tenu à Tunis la direction tunisienne n’a pas cherché à infléchir la position arabe commune demeurée hostile au régime de Damas.

Cela n’a pas empêché des partis politiques et la société civile d’agir pour le dégel des rapports entre Tunis et Damas. Dans ce cadre on rappelle la visite en Syrie d’une délégation de l’UGTT en août 2017, laquelle a été reçue par le président Bachar Al Assad. A la même époque une délégation de députés de différents partis s’est rendue elle aussi à Damas et a eu une rencontre avec le chef de l’Etat syrien.

Conduite par la députée M’barka Aouainia (Front populaire), la délégation se compose d’élus du Front populaire, de Machrou Tounes, de Nidaa Tounes et du Bloc démocrate.

La rencontre Jerandi- Mokdad augure de nouveaux développements au niveau des relations entre les deux pays. Le rétablissement des relations pourrait dès lors être envisagé. Le rétablissement complet des relations entre les deux pays est d’autant plus utile pour la Tunisie que les services syriens doivent disposer d’informations très intéressantes sur les « djihadistes » d’origine tunisienne qui ont afflué en Syrie et sont responsables d’actes terroristes perpétrés dans ce pays.

RBR