Par : Kamel Zaiem

En ces temps où tout va très vite dans la guerre que livre l’humanité contre la pandémie et alors que la Tunisie, subitement submergée par le mal du Covid-19, éprouve les pires difficultés pour s’en sortir avec les moindres dégâts, certains faits et certaines manipulations et révélations suscitent de vives interrogations.

 Aujourd’hui, alors que la pandémie fait des siennes et que les établissements hospitaliers sont submergés, que les cadres médicaux et paramédicaux appellent à la rescousse, le moment est à la détermination et au savoir-faire pour arrêter l’hémorragie et alléger le bilan. Or, ce qui se passe ça et là donne l’impression que les décideurs, en premier lieu la classe politique, surtout celle au pouvoir, ont choisi ce moment délicat pour ne pas dire critique, pour lancer des offensives loin d’être innocentes ni positives, pour faire douter de tout, semer la confusion et permettre à certaines forces de tenir à nouveau les rênes dans ce combat contre le Covid-19 qui semble prendre un nouveau tournant.

Curieuses révélations

Tout a commencé avec les révélations fracassantes de Nissaf Ben Alaya, la porte-parole du ministère de la Santé,  annonçant l’effondrement du système de santé. Une déclaration qui a eu l’effet d’un choc aussi bien chez nos citoyens qu’au-delà des frontières.

Et la suite a été encore plus bouleversante de la part d’une haute responsable qui  a longtemps  joui d’une certaine respectabilité dans l’opinion publique, étant en première ligne dans cette guerre sans merci contre l’épidémie, qui n’a pas hésité à en rajoute une couche : les statistiques fournies par l’Observatoire qu’elle dirige manquent de clarté et de précisions, et sont parfois intentionnellement trompeuses. Le nombre de décès annoncés ne sont en fait que les totaux calculés su plusieurs journées et non comptés en une seule journée. Il en ressort, en effet, que les chiffres déclarés par les directions régionales ne correspondent pas à ceux annoncés par l’Observatoire.  Chose qu’il fallait préciser pour ne pas induire tout le monde en erreur !

Un maudit jeu de chiffres

Cette rocambolesque révélation a fait réagir, entre autres, Abir Moussi, la présidente du PDL qui s’en est aperçue et demandé dans une vidéo mise en ligne au ministère de la Santé de fournir tous les détails nécessaires. Ainsi le nombre de décès annoncé au cours de la journée du 10 juillet s’élève à 68 sur un total de 194 annoncés et que celui du 11 ne dépasse pas une cinquantaine sur un total de 144.

Peut-on assimiler de telles déclarations à des manouevres volontaires pour faire passer un message bien particulier ?

Quelle mouche a donc piqué Nissaf Ben Aleya pour faire cette annonce fracassante et pour fournir des statistiques qui prêtent à confusion ?

Tout le monde le sait, Nissaf Ben Aleya a été une proche collaboratrice du ministre de la Santé Abdellatif Mekki dans le gouvernement Fakhfakh. Adoubée par le mouvement Ennahdha, son nom a été cité pour succéder à l’actuel ministre de la santé Faouzi Mehdi, un proche du chef de l’Etat Kais Saied, que le mouvement islamiste prend pour seul responsable de la catastrophe sanitaire. Il a même exigé son limogeage.

De là à dire que Nissaf a été quelque part manipulée pour « jongler » avec  les statistiques, il n’y a qu’un pas que plusieurs ont franchi.

La campagne est déjà lancée

Et puis, connaissant les manières détournées de nos gouvernants et de notre classe politique toujours aussi opportuniste, on comprend facilement la nouvelle ambition de Mekki qui veut coûte que coûte revenir sur scène à travers un ministère qu’il connaît bien et dans une mission beaucoup plus facile puisque son retour coïnciderait avec l’arrivée d’une grande quantité de vaccins et avec la diminution prévue du nombre de contamination, donc de décès.

Du coup, Abdellatif Mekki se trouvera sur du velours et gagnera des points sans trop se dépenser ni prendre de risques. Il l’a déjà fait lorsqu’il a pleinement profité du gros travail effectué par Sonia Ben Cheikh, alors ministre de la Santé, limogée pour des intérêts politiques alors qu’elle réussissait pleinement son boulot à cet important département.

A présent, toute une campagne est orchestrée pour refaire le même coup avec la complaisance d’un chef de gouvernement disposé à faire tout ce qu’exige sa ceinture politique au Parlement, quitte à se débarrasser de ses meilleurs ministres pour les remplacer par des bleus capables uniquement de tout mettre en œuvre pour mettre en exécution les plans d’une coalition au pouvoir fidèle à son image d’opportuniste à souhait.

K.Z.