Le 4 juin 2021, l’ICG (International Crisis Group) a publié un rapport intitulé « Le djihadisme en Tunisie : éviter la recrudescence de la violence » mettant l’accent, pour l’essentiel, sur la diminution des violences djihadistes et « des mesures répressives contre le terrorisme et trop peu ciblées ».
En 2019, la Commission nationale de lutte contre le terrorisme, en partenariat avec la Commission tunisienne d’analyse financière (CTAF), organe relevant de la Banque centrale, a gelé les activités et les avoirs de 157 associations et de 126 personnes soupçonnées de participation à des infractions terroristes.
Depuis la promulgation de la loi antiterroriste en 2015, une simple activité de propagande sur les réseaux sociaux ou la possession de littérature djihadiste suffisent à justifier une garde à vue pouvant aller jusqu’à deux semaines, une détention préventive ou une condamnation.
L’ICG évoque également les conditions de détention et le manque d’aide à la réinsertion des personnes condamnées pour terrorisme augmentant le risque de récidive. Environ les trois quarts des près de 2 200 Tunisiens emprisonnés en vertu de la loi antiterroriste auront purgé leur peine au cours des trois prochaines années
Selon un entretien réalisé par Crisis Group auprès d’habitants de Tunis, d’anciens détenus et même d’avocats (2016-2021), « l’arsenal législatif avec lequel le pays s’est développé a indubitablement dissuadé de nombreux djihadistes de s’engager dans la violence. propagande, mais les abus auxquels elle a donné lieu ont créé un sentiment d’injustice parmi ceux qui en ont été victimes »
Le djihadisme, qui représentait une solution viable pour les jeunes à leurs difficultés il y a quelques années, est en recul selon le rapport. Le mouvement salafiste-jihadiste semble avoir perdu de son attrait.
En constante augmentation depuis le soulèvement de 2010-2011, la violence djihadiste en Tunisie a culminé en 2015 avec trois attentats spectaculaires revendiqués par l’État islamique (EI) et, en mars 2016, avec la tentative de prise de contrôle de la ville frontalière de Ben Guerdane par un commando de la même organisation.
De mars 2016 à mars 2021, des djihadistes ou supposés djihadistes ont mené cinq opérations en zone urbaine, toutes limitées à Tunis et à une ville de la côte est. L’Etat islamique en a revendiqué trois. Seules trois personnes – des membres de la police et de la Garde nationale – ont été tuées dans ces attaques. En milieu rural, au cours de la même période, des violences ont eu lieu exclusivement dans les zones montagneuses et forestières de la frontière tuniso-algérienne, et ont entraîné la mort de onze soldats et gardes nationaux ainsi que deux bergers.
Selon l’ICG, cette baisse est, principalement, liée aux déboires militaires des grandes organisations djihadistes au Moyen-Orient et notamment en Libye.
l’ICG explique que le nombre de volontaires tunisiens dans les groupes djihadistes au Moyen-Orient et en Libye entre 2013 et 2016 a souvent été surestimé. Plusieurs avocats et journalistes affirment que leur nombre est d’environ 10 000, tandis que le gouvernement fait état de 2 929 combattants, une estimation probablement plus proche de la réalité. Plus des deux tiers de ces 2 929 combattants semblent avoir été tués ou emprisonnés à l’étranger.
Pour les groupes armés Okba Ibn Nafaa (affilié à al-Qaïda au Maghreb islamique) et Jund el Khilafa (affilié à l’Etat islamique), ils ont perdu les deux tiers de leurs troupes depuis 2016. Ils sont passés de 250 combattants à une soixantaine. Les forces armées ont éliminé plusieurs de leurs chefs successifs
A noter que, dans son rapport « Déclin du djihadisme en Tunisie ? Le chercheur de l’ICG (International Crisis Group) Michael Ayari souligne que “le pays n’est pas menacé par un mouvement djihadiste armé de masse”.