Dans un article publié ce dimanche 22 Août, sous le titre « Tunisie : Le coup de force du président fait craindre un recul des libertés », et signé Delphine Bancaud, le journal français 20 Minutes, écrit notamment que «la purge » anticorruption enclenchée par le président depuis son coup de force de juillet suscite inquiétudes et craintes d’un recul des libertés en Tunisie. »
Cette « purge », tout comme les arrestations, les interdictions de voyage et les assignations à résidence visent magistrats, députés et hommes d’affaires.
Depuis cette décision choc de suspendre le Parlement pour un mois et de limoger le Premier ministre Hichem Mechichi, le président Kais Saied n’a toujours pas nommé de nouveau gouvernement ni dévoilé sa « feuille de route », réclamée par plusieurs partis politiques et organisations de la société civile.
Des personnalités interdites de voyage
Si la Tunisie est l’unique pays de la région à avoir persévéré sur la voie de la démocratisation après le « printemps arabe », la communauté internationale s’inquiète désormais d’une régression. Plusieurs hommes politiques, hommes d’affaires, magistrats ou députés –dont l’immunité a été levée par Kais Saied– affirment avoir été interdits de voyage à l’aéroport de Tunis, voire avoir été assignés à résidence sans communication préalable. « La liberté de déplacement est un droit constitutionnel que je m’engage à garantir », a assuré cette semaine le président Saied. « Mais certaines personnes devront rendre des comptes à la justice avant de pouvoir voyager. »
Théoricien du droit, Kais Saied se présente depuis son arrivée au pouvoir en 2019 comme l’interprète ultime de la Constitution, et s’appuie sur son article 80, qui envisage des mesures exceptionnelles en cas de « péril imminent » à la sécurité nationale, pour justifier les mesures prises.
Les opposants craignent une « dérive autoritaire »
Mais pour Sana Ben Achour, professeure en droit public, certaines mesures s’apparentent à un « coup d’Etat ». Kais Saied « a le pouvoir et, pour lui, il est le seul apte à interpréter la Constitution » et détient donc tous les pouvoirs, a-t-elle récemment affirmé à des médias locaux. Face à ces accusations, Kais Saied répète régulièrement agir strictement « dans le cadre de la loi » et de la Constitution adoptée en 2014. Nombre de Tunisiens ont eux accueilli avec enthousiasme les mesures de Kais Saied : exaspérés par leur classe politique, ils attendent des actes forts contre la corruption et l’impunité dans un pays où la situation sociale, économique et sanitaire est très difficile.
Mais opposants, partis politiques, magistrats et avocats qui craignent une « dérive autoritaire » exhortent le président à présenter sa stratégie, alors que les mesures exceptionnelles sont « renouvelables » après 30 jours. Dans un communiqué, 45 magistrats ont notamment dénoncé « l’affreuse atteinte gratuite et sans précédent à l’encontre de la liberté de circulation et de voyage » visant certains de leurs confrères, « en l’absence de toute procédure judiciaire ».
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