Par : Kamel Zaiem

Le moment de vérité a sonné pour Kaïs Saïed. Celui qui a osé provoquer ce tsunami socio-politique dans le pays n’a plus le droit d’avoir la main qui tremble et il est appelé à aller au bout de ses intentions, les bonnes surtout.

Ceux qui soutiennent le président de la République se sont tous accordés à dire que Saïed ne doit pas trop tergiverser. Certes, chaque pas accompli nécessite attention et pertinence, mais il ne faut pas somnoler au moment où la fermeté, la détermination et l’autorité sont plus qu’indispensables.

Pour plus de célérité

Aussi bien en Tunisie qu’à l’étranger, on attend avec impatience la nomination du futur chef de gouvernement. L’UGTT, un allié de taille pour Saïed, appelle également à accélérer cette nomination pour pouvoir entamer la phase la plus délicate, celle de la mise en application de la nouvelle feuille de route qui sera établie selon les orientations fixées par le président, son chef de gouvernement et les principales composantes de la société civile.

Saïed – Taboubi: une entente à confirmer

Or, jusqu’à présent, nous ne percevons pas nettement le probable contenu de cette feuille de route. Certes, Saïed dispose de trente jours pour tout dévoiler, mais il est plus qu’urgent de mettre en place la future stratégie et d’entreprendre certaines actions qui n’attendent pas.

Kaïs Saïed ne doit plus se limiter à justifier son initiative. Il a répondu présent au moment opportun pour rejoindre son peuple, déçu et lessivé par dix ans d’errements et de dérapages et il est appelé à passer à l’action sans trop regarder dans le rétroviseur.

Que veut-il changer ?

Après avoir fait le plus difficile en libérant le peuple de l’hégémonie d’une classe politique corrompue et irresponsable, nous devons savoir où Saïed voudrait aller ? Que veut-il changer essentiellement ? Certaines réformes sont plus que nécessaires et tout le monde en convient tels la réforme du système politique, l’instauration d un régime présidentiel,  la révision du code électoral, l’organisation des législatives anticipées, la libération de la justice, demeurée pendant de longues années sous le joug des nahdhaouis, la divulgation de toute la vérité sur les assassinats politiques et l’appareil clandestin d’Ennahdha, l’engagement d’une véritable bataille contre les malfrats, corrompus, contrebandiers et terroristes…

En s’appuyant sur la légalité et en précisant les séquences, le calendrier et les modalités, il emportera l’adhésion la plus large, en Tunisie comme à l’étranger où les manifestations de soutien commencent à devenir plus consistantes.

Des priorités criardes

Ce ne sont, là, que des étapes sur lesquelles s’accordent tous les Tunisiens, mais il y a d’autres actions encore plus importantes car elles concernent la survie du peuple et son avenir. Le moment est grave et il ne faut surtout pas hésiter à s’attaquer sérieusement aux crises sanitaire, économique et sociale qui secouent le pays.

Un Parlement pourri et corrompu

L’assainissement de la scène politique est vivement souhaitable, mais il ne doit pas primer sur les situations d’extrême urgence. En fait, tout est logiquement lié. Le combat contre la corruption va impliquer systématiquement le redressement des entreprises publiques en difficultés et les institutions publiques telles que la caisse de sécurité sociale et le système de compensation.

Sur le plan économique ou nous attendons à des mesures de relance de l’économie nationale par des mesures sociales et économiques surtout après le rejet de la loi de relance par la BCT.

Un travail collectif

Ainsi, certaines actions doivent être lancées à court terme pour redresser la situation et pour rassurer quant à l’avenir d’un pays dévasté par une crise économique sans précédent. Et Kaïs Saïed, bien que connu pour son entêtement qui lui joue parfois de vilains tours, aura à s’entourer des érudits de l’économie et des finances et ils sont très nombreux chez nous. Ce sont eux qui peuvent rapidement lui proposer des solutions et des manœuvres pour assurer la relance de la restructuration des entreprises publiques, la restructuration des caisses de sécurité sociale et du système de compensation, la promulgation de lois d’incitation à l’investissement et la relance de la loi 2019-47 relative au climat des affaires. De telles initiatives, entreprises avec les composantes majeures de la société civile, essentiellement l’UGTT et l’UTICA aboutiront certainement à des décisions collectives qui garantissent l’adhésion de tous et facilitent la suite de cette opération de redressement.

Est-ce facile à réaliser ? A priori, si tout l’entourage, le bon, de Kaïs Saïed s’y met avec de réelles intentions d’ouvrir les portes aux principaux acteurs socio-économiques pour assurer une meilleure adhésion collectives aux choix fixés, cette entreprise sera sûrement réussie.

En ne disposant que de vingt autres jours pour dévoiler tout son programme, Saïed aura intérêt, avant tout, à en finir avec cette classe politique qui demeure encore résistante et nocive. En l’éliminant de manière légale et en faisant preuve d’un attachement à la démocratie et aux libertés que les Tunisiens ne sont plus prêts à lâcher, le président de la République a de fortes chances de voir son offensive réussir et plaire. A lui de se montrer encore plus habile et de se débarrasser d’une hésitation qui pourrait lui faire du mal.

K.Z.