Par: Salem Trabelsi
Penser mou, manipuler la diffamation et l’invective comme un fusil d’assaut, être moyen et réfléchir en sandwich devient une norme ! Fonctionner avec des compromis, dans le profond déni des valeurs dignes d’une démocratie aussi …. Cela conduit peu à peu à la clochardisation mentale, à la médiocrité emmitouflée dans les oripeaux de la démocratie . La révolution tunisienne semble avoir anesthésié tous les talents, toutes les « foudres de guerres » qui pétillaient comme des joyaux dans tous les domaines. Le médiocre devient le référent de tout un système.
Le terme de « révolution anesthésiante » est emprunté au philosophe Alain Deneatre, auteur du livre « La médiocratie » , paru en 2015 et qui évoque justement cette manière qu’a la démocratie de « futiliser » les hommes. Voici ce que dit ce Docteur en philosophie et enseignant en sciences politiques à l’université de Montréal « Rangez ces ouvrages compliqués, les livres comptables feront l’affaire. Ne soyez ni fier, ni spirituel, ni même à l’aise, vous risqueriez de paraître arrogant. Atténuez vos passions, elles font peur. Surtout, aucune bonne idée, la déchiqueteuse en est pleine. Ce regard perçant qui inquiète, dilatez-le, et décontractez vos lèvres – il faut penser mou et le montrer, parler de son moi en le réduisant à peu de chose : on doit pouvoir vous caser. Les temps ont changé (…) : les médiocres ont pris le pouvoir. »
Anesthésiante ou pas en Tunisie ? Pas besoin d’études scientifiques ni de statistiques ! Dix ans après la révolution le tunisien s’est aussi appauvri de l’intérieur, il est réduit à un simple consommateur lobotomisé qui , de plus est, rechigne devant la notion de l’effort et devant la valeur du travail qui fait avancer les nations. Son rendement est en chute libre et cela est devenu une norme dans les administrations où même les plus hauts responsables n’ont plus d’autorité sur leurs employés. Il n’y a qu’à voir la tenue vestimentaire de ceux qui travaillent dans l’administration tunisienne ….négligée … à la limite de la crasse parfois … Pire…. à cela s’ajoute l’effronterie et l’arrogance ….
« Mais c’est du partout pareil ! Comme nous a dit un cinéaste, les tunisiens ont cru qu’il est naturel de recevoir un salaire contre rien ! Tout ce qu’ils font dans leur boulot c’est une faveur qu’ils accordent à leur employeur …. »
Comment abrutir un peuple et le rendre paresseux ? Cela ne s’enseigne pas dans les universités.. mais c’est un métier à part entière et c’est un « art » qui demande ruse anticipation et surtout de la persévérance. Il ne s’agit pas de démolir tout comme certains le pensent, mais de déconstruire …. La différence ? C’est n’est que le temps que l’on se donne pour accomplir l’œuvre. Souvent la déconstruction est perverse car pernicieuse et marche sur la pointe des pieds. En Tunisie cela a commencé par le haut. Désigner des ministres, des chefs de gouvernements et des hauts responsables à la tête des institutions les plus prestigieuses sur la base d’aucune compétence au point de les ridiculiser. Or quand le haut niveau tire vers le bas le bas social n’hésite pas à tomber plus bas . C’est l’humain processus d’identification. L’Etat ? Absent, l’école ? Démissionnaire, la nouvelle République ? C’est Facebook et les réseaux sociaux….. pour certains c’est même une patrie à part entière ….Or c’est ce qui charrie le plus de fertilisants pour la paresse , la médiocrité et la terrible effronterie qui caractérise toute une génération . De toutes les possibilités extraordinaires de l’internet, l’accès aux réseaux sociaux est le seul a être prisé . Facebook existe ailleurs dans les pays développés, mais il ne remplace jamais les institutions ni la famille ni les grandes valeurs comme celui de prendre l’ascenseur social grâce au travail fourni. Publier, un statut même diffamatoire devient un passe- droit pour avoir droit au chapitre …. pire cela donne bonne conscience d’avoir accompli une mission , un effort , d’avoir « fait son travail » . Le pire reste à venir lorsqu’on prend en considération les un million deux cents milles abandons scolaires qui ont accompagné cette déconstruction sociale ….. C’est un petit peuple qui va grandir avec l’idée qu’il est tout à fait naturel de ne pas avoir d’idées …..
S.T