Par Soufiane Ben Farhat

  • Le Ministre de la Santé sait prédire les morts au Covid, mais ne sait pas les prévenir.

Cela devient à la fois dramatique et pathétique. En effet, les chiffres concernant la propagation de la troisième vague du Covid 19 en Tunisie sont catastrophiques. Pourtant, les autorités semblent tétanisées. Les vaccinations massives manquent à l’appel, les mesures de prévention et de traitement sont claudicantes, les hauts responsables disent la chose et son contraire. Le peuple est livré à lui-même.

Plus de dix-mille morts

Désormais, on comptabilise plus de deux-mille nouveaux cas d’atteinte au Covid 19 par jour sous nos cieux. En fait, cela a brutalement doublé. Le nombre des décès a lui aussi augmenté vertigineusement pour dépasser les dix-mille morts cette semaine. Pas plus tard qu’avant-hier, on comptabilisait 10.231 morts et au total 298.572 personnes atteintes.

L’on est passé ainsi de 25 décès en moyenne par jour à plus de cent quotidiennement. Nous sommes devenus le premier pays africain en nombre quotidien de décès dus au Covid, devant l’Afrique du Sud. Cela est dû en très grande partie à la propagation du variant britannique.

Jusqu’ici seulement 335 mille Tunisiens ont été vaccinés. Il est vrai que les inscriptions dans la plateforme Evax se caractérise par le peu de nombre de volontaires. Et on ne fait rien pour inciter le citoyen lambda à s’inscrire. Des centaines de centres de vaccination manquent à l’appel. Quant au nombre des personnes complètement vaccinées, il ne dépasse pas les 55 mille, soit 0,5 % de la population. Sous d’autres cieux, on avoisine les 30 %.

Plusieurs sons de cloche

Franchement, on est loin du compte. Le ministre de la Santé, M. Faouzi Mehdi, avait promis de faire vacciner trois millions de Tunisiens avant fin juin et cinq millions avant fin décembre 2021. Toutefois, à cette allure- là, il faudra y mettre trois ans au moins. En vérité, cela consacre le cuisant échec du gouvernement, en flagrant défaut d’initiatives et de solutions.

Pis, le comité de lutte anti-Covid a préconisé hier, samedi, la fermeture des frontières avec la France et la Libye, sinon la mise en place de structures et d’infrastructures de dépistages systématiques aux frontières. Le ministre de la Santé n’a guère trouvé mieux que de les démentir.

Autrement plus grave, il a annoncé samedi 24 avril qu’il y aura plus de deux mille morts au Covid en Tunisie au cours des deux prochaines semaines. Soit, un ministre de la Santé qui prédit froidement le nombre de morts au coronavirus mais qui ne sait pas protéger les citoyens de cette mort.

On a inventé le pseudo-confinement

A bien y voir, rien ne va. Les mesures préventives piétinent, les vaccinations balbutient, les atteintes et le nombre de victimes croissent vertigineusement.

Cependant, le gouvernement n’a guère pu ou su concevoir les mesures de confinement adéquates, qu’il soit total, partiel, sectoriel ou régional. Toutefois, il s’est contenté d’inventer le pseudo-confinement en bonne et due forme. Couvre-feu à 22 heures, interdiction de circulation des véhicules dès 19 heures, fermeture des écoles, lycées et universités jusqu’au 30 avril.

Mais cela demeure théorique, du moins pour le couvre-feu nocturne, la fermeture des cafés à 22 heures ou le respect de la distanciation sociale et des gestes barrière.

Laxisme et laisser-aller

Les cafés ne désemplissent pas jusqu’après minuit, les véhicules circulent librement dans bien des agglomérations et villes, les contrôles sont rarissimes. De jour, les moyens de transport public demeurent hyper-bondés, on joue des coudes et des hanches pour se frayer un passage dans les marchés, souks, magasins et grandes surfaces. Par ailleurs, le port du masque est de plus en plus rare et les sanctions à ce propos sont presque nulles. Partout, le laxisme et le laisser-aller sévissent.

Pourtant, tous les spécialistes en conviennent. Seules les mesures préventives radicales sont à même de prémunir les citoyens. Et seules les vaccinations massives permettront de reprendre un tant soit peu une vie normale. Toutefois, on est en droit de se demander : Les Tunisiens seront-ils vaccinés avant la fin du monde ?

S.B.F