- * Un colloque sur la dépénalisation des chèques sans provision s’est tenu, le 27 février dans un hôtel à Tunis, en vue d’ouvrir un débat et de trouver des solutions efficientes pour réformer la loi tunisienne.
- * 213.000 est le nombre de personnes emprisonnées en 2020 suite à l’émission de chèques sans provision.
- La loi tunisienne est claire : toute personne ayant émis un chèque sans provision est passible de 5 ans de provision, et est obligé de payer une amende représentant 40% de ladite somme
- Des députés de l’ARP planchent actuellement sur la réforme de cette loi jugée trop sévère et cassante
On entend souvent parler de personnes qui se sont retrouvées derrière les barreaux à cause de l’émission de chèques sans provision, plusieurs familles se sont effondrée. Des vies se sont cassés. Ce problème devient de plus en plus grave avec la résurgence de la pandémie de la Covid-19, ayant gravement touché le secteur économique. C’est la raison, pour laquelle il faut cesser de sous-estimer cette question et de regarder plutôt les choses en face. Que vaut finalement une loi qui légifère, qui brime et sanctionne, sans pour autant ménager le contrevenant !
Selon l’article 411 du Code du commerce, la loi tunisienne condamne d’une peine de 5 ans de prison et inflige une amende de 40% aux émetteurs de chèque sans provision. Une loi qui s’avère très sévère en termes d’atteinte à la vie humaine.
Loi internationale sur la dépénalisation des chèques sans provision
Le pacte international de l’ONU interdit le recours à l’emprisonnement dans le domaine commercial et civil. Plusieurs pays dont l’Angleterre (pays créateur du chèque), la France, le Canada et bien d’autres, comme la Mauritanie donnent des délais raisonnables aux débiteurs et pardonnent à ceux qui n’arrivent pas à recouvrir leurs dettes. En effet la Tunisie est le seul pays qui ne s’aligne pas à ce pacte ratifié depuis 1976.
L’article 411
La question des chèques sans provision devient de plus en plus critique en Tunisie, surtout après la révolution. La situation ne s’est plus améliorée avec la crise sanitaire qui a tant aggravé les choses. Ce qui a amené les observateurs à tenir le système socio-économique local et la crise actuelle pour responsable. En tenant compte du taux d’emprisonnement qui a augmenté de 70% pour atteindre 213.000 en 2020, certains députés ont pris l’initiative de reformer l’article 411, en proposant la loi 45/2020 assouplissant les sanctions et les peines.
Dépénalisation des chèques sans provision
Un colloque sur la dépénalisation des chèques sans provision s’est tenu, le 27 février dans un hôtel à Tunis, en vue d’ouvrir un débat et de trouver des solutions efficientes pour réformer la loi tunisienne.
Le colloque a porté sur trois axes essentiels, à savoir l’abolition de la peine de prison, les répercussions de ladite loi sur la société et sur l’économie, et les solutions proposés.
Le directeurnde la Sécurité nationale, Anis Amrouni, a mis l’accent sur la nécessité de réformer l’article 411 du, Code de commerce en remplaçant la punition de prison par des sanctions administratives et financières.
Un représentant de la société civile, Aziz Krichen, a pour sa part indiqué que la peine de prison constitue une atteinte à la liberté du citoyen et sa dignité d’un être humain : « On est déterminé à faire face à ce combat » précise-t-il.
Dans cette optique, le député Abdellatif Aloui (Coalition de la dignité) a souligné que l’initiative de la loi 45/2020 présentée par son parti, constitue une solution pour le problème des chèques sans provision.
En effet, l’initiative propose le recours au chèque électronique. Et ce, en vérifiant à travers une plateforme digitale, le solde de l’émetteur avant d’émettre le chèque à son destinataire.
Il a aussi proposé de remplacer la peine de prison par une sanction qui implique l’exécution d’un travail non rémunéré en vue de préserver la vie de Tunisiens.
Pour sa part, la député Leila Hadad (Bloc démocratique) a mis l’accent sur l’ampleur de cette question, en affirmant que non seulement les petites sociétés ont fait faillite, mais les citoyens aussi ont été touchés par la pénalisation des chèques sans provision.
Il est temps de porter une réflexion sérieuse autour de ce sujet qui a, sans doute, mis à genoux plusieurs Tunisiens et fait basculer des vies. Et comme le stipule la loi internationale sur la dépénalisation des chèques sans provision « Le seul garant du bien est le bien » et non le corps humain.
Linda Megdiche