Par : Kamel Zaiem

Au lendemain des mesures annoncées par Kaïs Saïed, le président de la République le soir du 25 juillet, l’UGTT fut la première des fortes composantes de la société civile à le soutenir malgré quelques réserves.

Du coup, on s’attend à une forte contribution de la part de la Centrale syndicale dans l’édification du projet prôné par Saïed.

Pas de chèque en blanc

L’Union générale tunisienne du travail (UGTT) a appelé, dès le 26 juillet, à des garanties constitutionnelles pour accompagner les mesures exceptionnelles annoncées la veille par le président de la République, Kais Saied. Elle a appelé à l’identification des objectifs des mesures exceptionnelles annoncées et à la définition des dates du début et de la fin de leur application, soulignant l’importance de respecter les droits, notamment socio-économiques et du recours à des mécanismes démocratiques et participatifs dans tout changement politique.

Dans ce même communiqué, l’UGTT a également fait savoir qu’elle tenait à la légitimité constitutionnelle dans toute procédure engagée à ce stade, pour assurer le respect de la Constitution et de la voie démocratique et pour rétablir la stabilité dans le pays, selon le communiqué.

Jeudi 5 août, reblote. Noureddine Taboubi, le patron de l’UGTT, a rappelé, depuis Sfax où il a présidé un meeting, que la décision de la centrale syndicale de soutenir les mouvements populaires du 25 juillet 2021 et d’appuyer les mesures annoncées par le président de la République témoigne de la ferme volonté de la centrale syndicale de respecter les choix du peuple, partant de sa conviction que la Tunisie “est en grand danger, d’où la nécessité de prendre des décisions audacieuses pour sauver notre pays”.

Contribuer à sauver le pays

Toutefois, il a précisé que l’adhésion aux nouvelles mesures du 25 juillet “n’est pas un chèque en blanc”, appelant le président de la République à annoncer une feuille de route claire et accélérer la nomination d’un chef de gouvernement et une équipe gouvernementale pour combler un vide qui pouvait tout compromettre.

Pour sa part, Sami Tahri, le secrétaire général adjoint et le porte-parole de l’UGTT vient de révéler que la Centrale ouvrière vient d’élaborer une « feuille de route » pour sortir le pays de la crise actuelle qu’il traverse. Cette feuille de route a été présentée aux membres de sa commission administrative lors d’une réunion exceptionnelle et elle sera remise au prochain gouvernement. Ce qui veut dire que ce document ne sera pas divulgué avant la formation d’un gouvernement, un fait que tous les Tunisiens attendent avec impatience pour voir le pays redémarrer dans son œuvre de salut.

Cette prise de position intervient alors que l’initiative de Kaïs Saïed a été différemment interprétée par les composantes du paysage politiques avec des partis qui considèrent les mesures présidentielles d’exception comme un « coup d’Etat contre la Constitution », tandis que d’autres y ont été favorables, estimant qu’il s’agissait d’une « rectification du processus révolutionnaire ».

Un goût de revanche

Cette option vient d’être confirmée par Taboubi qui a, encore une fois, demandé au président de la République  de clarifier sa vision concernant le système politique, la loi électorale, la loi des partis, la loi des associations, sa vision de l’économie et ses choix sociaux car le soutien déclaré de l’UGTT dépendra essentiellement de ces visions.

C’est dire que Saïed va beaucoup compter sur le soutien des syndicats, très influents dans quasiment tous les secteurs, pour aller de l’avant dans son entreprise, mais il sera tenu à collaborer et à consulter l’UGTT et les autres grosses cylindrées de la vie politique, sociale et économique pour pouvoir avancer et écarter tout danger de vilaines réactions de la part de ceux qui se trouvent déjà hors-jeu et qui ne seront sûrement pas les bienvenus dans tout ce qui sera décidé pour l’avenir du pays.

Ainsi, l’UGTT, fortement critiquée par Ennahdha et ses alliés durant les dernières années, semble prendre sa revanche et acquérir, désormais, un rang très respectable qui lui permettra de figurer parmi les centres de décision en faisant preuve, bien sûr, de responsabilité et de maturité.

K.Z.