Par : Kamel Zaiem

Encore un nouveau responsable à la tête du ministère de la Santé, le sixième en un an et demi, alors que la situation ne fait qu’empirer malgré les aides étrangères.

A défaut de nous étaler les détails de la stratégie de son gouvernement  pour mieux lutter contre le Covid-19 dans ce grave contexte caractérisé par une flambée des chiffres et des courbes des décès et des contaminés, Hichem Mechichi, le chef du gouvernement, nous sort, encore une fois, une thérapie qui a déjà prouvé ses limites et sa stérilité.

Journée portes (d’enfer) ouvertes !

Mechichi a profité du rocambolesque scénario de la journée de l’Aïd avec cette trouvaille des portes ouvertes pour la vaccination des plus de dix-huit ans et les tristes faits qui s’en suivirent, pour tout mettre sur le dos de son dorénavant ex-ministre de la Santé et profiter de l’occasion pour se débarrasser de l’un de ses lieutenants, plutôt connu pour être proche de Kaïs Saïed, le président de la République.

Le chef du gouvernement a ainsi frappé un double coup en usant d’une seule pierre : mettre hors circuit un ministre qui dérange et faire comprendre que c’est bien Faouzi Mehdi qui est derrière l’hécatombe enregistrée ces dernières semaines.

Or, ce chapitre des deux journées annoncées pour la vaccination des jeunes ne constituait qu’un alibi longuement recherché par un Mechichi de plus en plus contesté, lui qui venait de se prendre en photos et vidéos lors d’un récent séjour « impérial » dans un hôtel de luxe à Hammamet alors que ses concitoyens tués par le coronavirus se comptent quotidiennement par centaines et alors que la plupart des Tunisiens étaient interdits de circuler d’un gouvernorat à l’autre.

Mauvaises intentions

Et quoi de mieux que de mettre en scène ce fait de vaccination exceptionnelle pour faire oublier ses déboires, son attachement sans réserve à la ceinture politique qui le soutient et l’absence totale d’une stratégie claire et pratique de son gouvernement dans cette guerre contre la pandémie.

Car, qu’on le veuille ou pas, Faouzi Mehdi, le ministre limogé de la Santé, n’aurait pas annoncé ces deux jours de portes ouvertes pour le vaccin sans avoir consulté, au préalable, son patron, tout autant responsable que son ministre, d’autant plus que Mechichi porte également le portefeuille de ministre de l’Intérieur par intérim et il doit assumer ce qui s’est passé dans ces centres et la gabegie qui y a eu lieu. Or, il était clair que le chef du gouvernement a pleinement profité de ce triste épisode pour aller au bout de ses « mauvaises » intentions.

De ce fait, le chef du gouvernement, qui n’arrive plus à assumer convenablement ses tâches essentielles, est appelé, avant ses lieutenants, à laisser la place à quelqu’un de plus compétent, de plus sérieux, de plus intègre et de plus altruiste. 

Un nouveau ministre pour quoi faire ?

Et c’est Mohamed Trabelsi, le ministre des Affaires sociales, qui est devenu, depuis ce mardi, le nouveau patron du ministère de la Santé, un département où les tâches et les hautes responsabilités demeurent partagées par plusieurs têtes influentes alors que la présence d’un homme fort à Bab Saadoun est plus que nécessaire. Saura-t-il s’imposer et surtout mettre au point la stratégie adéquate pour remporter la guerre contre le Covid-19 ? On le lui souhaite, mais il faut toujours rappeler que tout passe par la Kasbah, le lieu de la présidence du gouvernement, car Mechichi ne laissera pas un ministre lui marcher sur les pieds et s’opposer à sa politique partisane qui tient, avant tout, à satisfaire ses protecteurs au Parlement, essentiellement Ennahdha, Qalb Tounes et Al Karama.

Ainsi, le bal des ministres continue au sein du plus important ministère en ces temps de pandémie. Trabelsi vient de prendre en main un département très sensible au sein d’un gouvernement déjà affaibli par des départs non remplacés après un remaniement resté inabouti. Le président Kaïs Saïed, qui jouit d’une importante popularité, a refusé en janvier de laisser prêter serment des ministres pourtant validés par le Parlement. Résultat : le gouvernement compte depuis de nombreux ministres intérimaires cumulant plusieurs fonctions, notamment à la Justice, ou encore à l’Intérieur.

Les Tunisiens, qui en ont vu de toutes les couleurs, peuvent-ils encore faire confiance à Hichem Mechichi et à sa manière très contestée de gérer la pandémie ?

 Pas loin de la Kasbah, Kaïs Saïed, toujours aussi indécis et hésitant, affirme que les militaires vont se mêler davantage de cette guerre contre la pandémie. Quand et comment ? Personne ne peut prétendre en savoir davantage.

K.Z.