Par : Kamel Zaiem
Face à une pandémie qui ne plie pas, la Tunisie a choisi de sombrer jusqu’à une probable immunité collective, faute de pouvoir mettre en place une stratégie claire pour sauver ses citoyens.
C’est du moins ce qu’on constate à travers les balbutiements et le bredouillement d’un ministre brouillon et indésirable pour la coalition au pouvoir et un chef de gouvernement mis sous pression et mobilisé pour satisfaire sa ceinture politique plutôt que servir les intérêts d’une population qui ne sait plus à quel saint se vouer.
Au royaume de la confusion
Dans un décor pareil, la gestion de la pandémie a été et demeure jusqu’à présent approximative, par la faute d’un exécutif opportuniste et insoucieux, des autorités sanitaires dépassées et une population indiscipline et à bout de patience au point de se jeter maladroitement dans la gueule du loup.
Le scénario dramatique vécu aujourd’hui en Tunisie ne manque pas de surprendre tout le monde. Pour un pays qui a été cité en exemple lors de la gestion de la première vague de la pandémie en mars 2020, vivre le cauchemar d’aujourd’hui est inconcevable.
C’est qu’au ministère de la Santé, on n’a jamais su comment affronter l’ogre viral. Et ce n’est pas la mise en place de la Commission de lutte contre le Covid-19 qui va résoudre les problèmes de plus en plus complexes sur le terrain.
En fait, ce combat nécessite une stratégie entière qui engage toutes les parties concernées avec, pour mot d’ordre, la nécessité de coopérer pour prendre les mesures qui s’imposent et qui peuvent être mises en exécution.
A chacun sa propre stratégie
Or, les scientifiques et experts en matière de pandémie compter user des mêmes armes que les autres pays touchés utilisaient, notamment le confinement total lorsque la situation l’exigeait. Ce qui a été quasiment rejeté par le gouvernement, pas prêt pour fournir des compensations financières aux citoyens confinés ni pouvoir imposer de force de telles mesures à une population exaspérée et lasse de subir ce genre de thérapie dont il ne saisit toujours pas la portée et qui va attiser davantage sa colère dans un contexte socio-économique particulièrement tendu.
Résultat : les gens n’ont plus confiance dans le commandement. Pis encore, ils ne veulent plus respecter les mesures de précaution. Pourtant, il s’agit des mêmes citoyens qui l’ont fait en 2020 ».
Ce qui a changé, c’est que le citoyen ne fait plus confiance à son gouvernant ni aux recommandations, d’où cette anarchie fatale face à un virus redoutable qui ne pardonne pas.
Aujourd’hui, toutes ces parties prenantes du mal qui s’est transformé en drame contribuent, d’une manière ou d’une autre, à l’horrible descente aux enfers avec des bilans quotidiens qui donnent froid dans le dos.
Et au moment où les lits de réanimation, les vaccins, l’oxygène et même les places dans les morgues manquent terriblement, les décideurs continuent à user des mêmes pratiques qui préservent leurs intérêts étroits et leur ego.
Une gestion d’intérêts
Et ce qui se passe ces derniers jours, met à nu un chaos total au niveau de la gestion. Les nouvelles et les chiffres sont en train de défiler devant nos yeux, émanant du ministère de la Santé, de celui des Affaires étrangères, de la présidence du gouvernement et même du palais de Carthage, sans cohérence ni clarté. On annonce de partout l’arrivée des dons offerts par certains pays amis, mais on ne voit rien changer. Les centres de vaccination marchent toujours au ralenti, ferment parfois leurs portes alors que la plupart des hôpitaux réclament de l’oxygène comme si les importantes quantités arrivées ne sont que fictives.
Au ministère de la Santé, une réunion d’urgence a été tenue à la demande du chef du gouvernement pour examiner l’état des lieux et annoncer de nouvelles mesures pour fournir de l’oxygène à tous les établissements de santé concernés par ce combat contre la pandémie. Quelques heures après, c’est le ministre lui-même qui déclare avoir provoqué cette réunion.
Au Parlement, certains partis, usant de leur coutumier opportunisme, annoncent des dons et des contacts avec des pays amis, rien que pour recueillir l’appréciation d’une éventuelle nouvelle masse électorale.
A Carthage, Kaïs Saïed a, lui aussi, mis la main à la pâte en rassurant les citoyens quant à l’arrivée d’importantes quantités d’oxygène grâce à ses contacts avec les hauts dirigeants des pays amis concernés.
Pour une direction à une seule tête
C’est dans cette ambiance de confusion que les décideurs politiques sont en train de gérer la pandémie comme s’il s’agissait d’un simple fait de tous les jours. Et ceci nous amène à comprendre le pourquoi de ce cuisant échec politique face à un virus qui tue de plus en plus et des citoyens qui paient de leur vie l’absence d’une véritable stratégie et d’une direction à une seule tête qui aura à assumer pleinement ses responsabilités de leader dans cette guerre, à prendre les mesures qui s’imposent et à communiquer des chiffres et des informations fiables et convaincants.
Verra-t-on, désormais, tout ce beau monde travailler en communion et en harmonie ? Les verra-t-on laisser de côté leurs différends pour se concentrer sur l’essentiel et pour mettre fin à ce long feuilleton de la mort ?
Avec la dramatique situation pandémique d’aujourd’hui, ils se trouvent dos au mur et dans l’obligation de mettre la main dans la main car ce tsunami finira par tout emporter sur son chemin, y compris ceux qui tiennent les commandes.