Par : Kamel Zaiem

Pour une séance plénière au Parlement, ce qui s’y est passé demeurera dans les annales. Ceux qui cherchent à éterniser l’état de chaos et de confusion au pays font du « bon travail » pour parvenir à leurs fins.

L’Assemblée des représentants du peuple avait à approuver le projet de loi relatif à la convention entre le gouvernement tunisien et le fonds Qatar pour le développement portant sur l’ouverture d’un bureau du fonds en Tunisie. Un accord fort contesté car portant plusieurs angles équivoques, puisqu’on parle d’un accord international alors qu’il s’agit, en fait, d’une convention signée par un partenaire qatari et non l’Etat du Qatar.

Le mystère de l’accord qatari

Et comme tout ce qui se trame avec le Qatar est souvent confronté à une vague d’opposition, pour des raisons politiques évidentes, sachant qu’Ennahdha et ses satellites sont les seuls à soutenir et parfois à imposer de tels accords, le projet fut contesté par quelques blocs politiques au Parlement, avec Le PDL et sa présidente Abir Moussi en tête.

Ce qui s’est passé, mercredi sous l’hémicycle du Parlement, ne fut point le fruit d’un pur hasard et l’acte de violence, de la part de Sahbi Smara, un député indépendant qui faisait partie du bloc « Al Karama », et qui s’est attaqué à une femme députée devant les caméras et en présence d’une ministre venue répondre aux interrogations des députés, ne peut qu’être prémédité puisque, finalement, l’accord a été approuvé sans trop faire de bruit puisque seul l’incident de la sale agression a accaparé l’attention et les esprits, aussi bien au Parlement que chez l’opinion publique.

Cette double agression, puisque Seifeddine Makhlouf, le chef de file d’Al Karama s’est associé à cet ignoble crime, vient nous rappeler que la Tunisie est en train de vivre l’une des pages noires de son histoire. Avec un tel Parlement, tous les acquis du pays sont menacés dont, notamment, le droit de la femme à l’égalité et à la liberté d’expression ? Ce qui est encore plus désolant, c’est que la vice-présidente du Parlement, Samira Chaouachi, qui est, à notre connaissance, une femme, n’a même pas interrompu la séance ni montré une quelconque gêne, alors que Imen Houimel, la ministre de la Femme, n’a ni interrompu la séance ni exprimé sa désapprobation, comme si de rien n’était. Eh oui, il ne fallait pas qu’elle se dresse contre les nahdhaouis et leurs complices qui soutiennent son patron, Hichem Mechichi.

Des dossiers terroristes en jeu

De même, cet incident survient, comme par hasard, le même jour de la tenue d’une conférence de presse   du comité de défense des martyrs Chokri Belaïd et Mohamed Brahmi. Les avocats du comité ont annoncé au public que l’ancien procureur de la République, Béchir Akremi, aurait étouffé quelque 6268 dossiers terroristes. Le comité a révélé, dans cette même conférence, qu’il a pris possession du rapport d’enquête établi par l’Inspection générale relevant du ministère de la Justice et que ce rapport, confidentiel, sera dévoilé au public, dans le détail et dans plusieurs langues, à partir de la semaine prochaine et par épisodes.

C’est dire que pour Ennahdha, il y a péril en la demeure avec une succession de faits plus que dangereux et compromettants, et la meilleure façon de détourner l’attention de l’opinion publique était de noyer le poisson et de mettre en scène un fait aussi vile pour faire oublier ces terribles révélations.

Et on peut dire que le coup était bien joué puisqu’on ne parle plus de ces 6268 dossiers terroristes « enterrés » et seule l’exhibition de Sahbi Smara figure désormais en tête d’affiche de l’actualité.

Platitude, silence et complicité

Côté réactions, celle des nahdhaouis est venue confirmer tout le scénario mis en place. Point de condamnation ferme et un rappel du comportement de la présidente du PDL qui, à leur avis, avait l’habitude de bloquer les travaux du Parlement et de provoquer de tels incidents. Il ne manquait que l’accuser d’avoir pris les mains du boxeur Smara et de les avoir collées à son visage et à son corps !

Du côté du Parlement, certains partis d’opposition ont ouvertement condamné cette lâche agression alors que d’autres partis et députés, en mal de liberté d’expression de par leur alliance cachée avec Ennahdha, ont préféré fermer les yeux et la bouche. Le même mutisme a curieusement caractérisé le palais de Carthage puisque Kaïs Saïed, celui qui est chargé de protéger la Constitution qui garantit les droits de la femme, garde encore un silence inquiétant qui n’augure de rien de bon.

Avec un Parlement qui regorge de bandits et de protecteurs de terroristes, avec un chef de gouvernement qui leur tend la main et tolère tous leurs dangereux dérapages et avec un président de la République dépassé par les événements, on peut réellement avoir peur pour cette Tunisie de plus en plus menacée par ceux qui veulent lui oter ses valeurs et son identité et qui font tout pour semer la confusion pour mieux tenir les rênes du pouvoir. Dommage…

K.Z.