Oversight Board : le Conseil de surveillance ou la Cour suprême de Facebook

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Depuis la fin de l’année 2020, le réseau social le plus populaire dans le monde, avec plus de 2 milliards d’utilisateurs mensuels actifs, s’est doté d’un Conseil de surveillance visant à « Garantir la liberté d’expression au moyen d’un jugement indépendant ».


Ce conseil, comparé à un tribunal ou à une Cour suprême, représente l’ultime recours de tout utilisateur du réseau social dont une publication a été censurée par les équipes de modération de Facebook. En effet, depuis 2016, le réseau social a formé des équipes de modération dont le but est de traquer les publications interdites par les règles de Facebook. Il s’agit dans la plupart des cas de pornographie, contenus haineux, propagande terroriste, etc… ainsi que les publications signalées par les internautes eux-mêmes.
Le travail de ces équipes est épaulé par des algorithmes et un système d’intelligence artificielle dont l’assistance conduit dans certains cas à une suppression automatique de certaines publications jugées non-conformes avec les standards de la communauté.

Le rôle du conseil de surveillance de Facebook

Certaines décisions des équipes de modération de Facebook sont contestées. L’utilisateur se sentant censuré peut alors demander à Facebook ou Instagram d’examiner à nouveau son cas. Si la suppression est maintenue il peut alors faire appel de cette de décision auprès du Conseil de surveillance de Facebook.
L’utilisateur dispose de 15 jours pour saisir le conseil. Pour cela il doit se connecter sur son compte Facebook ou Instagram et utiliser un identifiant (ID) fourni par le réseau social après le rejet de la demande d’examen de la décision initiale.
Cependant, toutes les demandes d’appel ne sont pas automatiquement acceptées. Une sélection est faite par les membres du Conseil de surveillance qui évaluent les cas soumis et mettent en place un jury issu des membres du conseil pour émettre, dans un délai maximal de 90 jours, une décision qui aura une force exécutoire à moins qu’elle n’enfreigne la loi.

Composition du Conseil de surveillance de Facebook

L’ancien directeur exécutif de l’ONG Article 19, active dans la défense de la liberté d’expression et les droits numériques, Thomas Hughes, préside actuellement le Conseil. Pour ce qui est des membres, sur les 40 personnalités indépendantes annoncées initialement on retrouve 16 seulement affichées sur le site Internet.
Facebook justifie le choix des membres par leur capacité à « prendre et expliquer des décisions basées sur un ensemble de règles ou principes et disposent de solides connaissances en matière de contenu numérique et de gouvernance ». Parmi ces membres on peut citer la Yéménite, Tawakkol Karman, lauréate du Prix Nobel de la paix, la franco-camerounaise directrice générale de de l’ONG « Internet Sans Frontières », Julie Owono, ainsi que la Pakistanaise fondatrice de la Digital Rights Foundation, Nighat Dad, et l’ancienne première ministre du Danemark, Helle Thorning-Schmidt.
L’adhésion au conseil reste ouverte. On peut recommander une personnalité ou se recommander soi-même en suivant un processus indiqué sur le site du Conseil.

Les récentes décisions du Conseil de surveillance de Facebook

Depuis sa création, le conseil a tranché dans 7 cas. La décision de modération de Facebook a été reconduite à une seule occasion.
Sa décision la plus récente date du 12 février 2021 et a contraint Facebook à remettre en ligne une publication dans laquelle le président de la république française avait été comparé au diable. Il s’agit d’une publication dans un groupe consacré aux musulmans indiens avec une série de hashtags appelant au boycott des produits français. Facebook, à travers son équipe de modération, a jugé que la publication incite à la haine envers les non-musulmans.
« Si une minorité du conseil a interprété la publication comme une menace de violence en réponse au blasphème, la majorité a considéré que les références au président Macron et au boycott des produits français sont des appels à l’action qui ne sont pas nécessairement violents… La majorité du conseil a considéré qu’au même motif que les individus ont le droit de critiquer les religions, les personnes religieuses ont le droit d’exprimer leur offense », peut-on lire dans le texte ayant accompagné la décision du Conseil.

Le Conseil de surveillance saisi par Facebook

Suite à l’invasion du Capitol par les partisans du président américain Donald Trump, Facebook a pris la décision du suspendre ses activités sur le réseau social jusqu’au 20 janvier, date de la passation du pouvoir à la Maison-Blanche.
Pour autant les comptes de l’ancien président US sur Facebook et Instagram n’ont pas été rétablis après cette date. Les responsables du réseau social se posent la question épineuse de la modération ou pas de la parole des chefs-d’Etat.
«De nombreuses personnes ne sont pas à l’aise avec l’idée que des entreprises tech aient le pouvoir de bannir des chefs d’États. Beaucoup arguent qu’une entreprise privée comme Facebook ne devrait pas prendre seule de telles décisions. Nous sommes d’accord avec ce constat», écrit Nick Clegg, responsable des affaires publiques de Facebook.
Saisi par la direction de Facebook, le Conseil de surveillance devra donner son avis sur la question avant la mi-avril.